Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 10.djvu/105

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le candidat, dont il fallait avoir raison. La peine que la loi prononçait contre lui était suffisante, il n’était pas nécessaire de la modifier ; il ne s’agissait pas non plus de l’enlever à la juridiction des comités de la chambre des communes, qui seuls sont compétens pour statuer sur la validité des élections, et dont le choix donne aujourd’hui toutes les garanties d’une impartiale justice[1]. C’étaient d’autres précautions qui devaient être prises ; il fallait commencer par rendre plus facile découverte de la corruption, afin de forcer, les uns après les autres, les retranchemens de la procédure derrière lesquels le coupable bravait trop aisément la répression. Ainsi les faits qui étaient prouvés à la charge de tel ou tel agent d’un candidat ne pouvaient être imputés au candidat lui-même, si la preuve légale des pouvoirs donnés par lui à son agent faisait défaut : cette preuve cessa d’être exigée par un acte de 1841, et aussitôt, dans cinq cas sur huit, il y eut condamnation. D’autre part, le candidat incriminé, pour n’être pas déclaré coupable et ne pas perdre le droit d’être réélu dans un autre collège électoral, avait souvent coutume de donner sa démission au profit de son concurrent, afin que toute plainte fût retirée : aux termes d’un acte de 1842, la plainte retirée peut être reprise par un comité qui fait nommer par le président de la chambre un agent chargé de l’enquête, sur laquelle la chambre entière doit prononcer. En outre, d’après la loi commune, les parties intéressées ne devaient pas être entendues dans les affaires civiles, et la force de l’évidence ne pouvait être attribuée qu’aux dépositions des témoins : en 1851, la loi commune a été changée, et les candidats mis en cause, qu’elle avait jusqu’alors protégés, ont été désormais soumis à un interrogatoire sur faits et articles qui ne leur permet guère d’empêcher que la vérité ne soit conquise contre eux pas à pas. Enfin la définition des faits qui devaient donner lieu à l’annulation

  1. Il peut n’être pas indifférent de connaître les dispositions d’un dernier acte de 1848 qui règle aujourd’hui l’organisation de ces comités. Ainsi à l’ouverture de chaque parlement le président de la chambre choisit, de l’aveu de l’assemblée, six membres qui sont toujours pris parmi les députés reconnus les plus capables. Ces six membres composent le comité appelé le comité général des élections. Le comité général dresse à son tour une liste appelée la liste des présidens (chairmen’s panel) ; elle doit comprendre de six à douze membres qui se choisissent entre eux pour présider tour à tour chacun des comités spéciaux. Le comité général répartit ensuite tous les membres de la chambre dont l’élection n’est pas attaquée en cinq tableaux, dont l’ordre de service est tiré au sort, et sur le tableau de service il désigne pour chaque cause un comité de quatre membres qui tient publiquement ses séances. Ce comité de quatre membres est celui qui est chargé de confirmer ou d’annuler l’élection, et il est présidé par un des membres appartenant à la liste des présidens. Toutes ces dispositions, qui garantissent les avantages du bon choix et du hasard, complètent les précautions qui ont été prises. En attribuant les pleins pouvoirs aux comités ainsi constitués, au lieu de les réserver à la chambre des communes tout entière, la loi a eu en vue d’empêcher que le jugement ne pût devenir, au profit de la majorité, une question de parti.