Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 6.djvu/9

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
MME DE STAËL


AMBASSADRICE DE SUÈDE





Il y a quelques années, la presse française annonça qu’on venait de faire dans la vieille capitale scientifique et littéraire du Nord Scandinave, à Upsal, une précieuse découverte. Au fond d’un obscur souterrain, on avait trouvé, disait-on, plus de cent caisses remplies de lettres et de documens historiques laissés par Gustave III. Un lecteur un peu exercé pouvait aisément reconnaître dans cette mystérieuse annonce la fantastique imagination que déploient trop souvent nos feuilles quotidiennes, quand il s’agit de quelque pays lointain et particulièrement du Nord. On voulait parler sans doute des deux caisses contenant les papiers légués en 1788 par Gustave III à l’université d’Upsal, lesquelles devaient être ouvertes cinquante ans après sa mort. Gustave III étant mort en 1792, les caisses avaient été ouvertes en 1842, le 5 avril, en présence d’une commission nommée par le gouvernement; les papiers avaient été classés, catalogués, reliés soigneusement, et la collection, composée de soixante-quatre volumes in-folio et de cinquante-cinq in-quarto, allait être livrée au public. Il n’y avait là rien d’inattendu, rien d’obscur ni de suspect pour qui connaît le zèle consciencieux et les soins érudits qui signalent à l’estime de l’Europe savante les bibliothécaires et les archivistes du Nord.

Réduite à ses véritables proportions, la nouvelle n’en méritait pas moins d’être remarquée en France. Gustave III, soit par les entreprises hardies de sa politique, soit par sa vive sympathie pour notre brillante civilisation, avait été intimement mêlé à notre his-