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plus actives que jamais ; un amiral russe enfin, l’amiral Glasenap, vint visiter les ports et les forteresses du royaume. On répondit à toutes ces mesures par la résolution d’élever autour de Stockholm de nouvelles fortifications, bien que cette capitale fût admirablement défendue déjà par l’inextricable archipel qui la précède à l’orient, et qui en rend l’accès impossible pour un navire sans pilote expérimenté.

La meilleure défense cependant était une forte et libérale politique qui, au dehors, fit compter la Suède dans les conseils des grandes puissances, devenues ses alliées, et au dedans resserrât les liens qui unissent au pays la dynastie qu’il s’est donnée en 1811. Déjà certaines mesures intérieures avaient été prises par le roi Oscar, qui devaient conduire également à l’un et à l’autre résultat. La nomination du prince royal à la vice-royauté de Norvège avait été l’une des plus heureuses. Par ses manières franches et ouvertes, par son respect certainement sympathique et sincère des mœurs et des vieilles traditions Scandinaves, le prince devait se concilier promptement l’affectueuse confiance des Norvégiens ; c’est ce qui est arrivé, et cette habile politique a cimenté l’union des deux royaumes frères.

Ce n’était pas assez. La diète, qui est, comme on sait, triennale, devait se réunir au milieu du mois d’octobre 1856. Le roi Oscar voulut que son gouvernement se présentât aux mandataires de la nation avec tous les traits de sa physionomie nouvelle. La retraite de deux ministres, MM. de Palmstierna et de Stierneld, et celle du directeur général des douanes, furent accueillies par l’opinion publique comme d’heureux indices de changemens dans l’ordre politique et la haute administration. L’arrivée de MM. Gunther et Almqvist au ministère excitèrent surtout de vives espérances. Tous deux avaient jusqu’à ce jour appartenu décidément au parti libéral modéré, et leur appel dans les conseils de la couronne paraissait devoir ouvrir une époque toute nouvelle dans le règne du fils de Bernadotte.

Le discours de la couronne, d’ordinaire peu significatif et peu remarqué, était cette fois impatiemment attendu, et il a dépassé toutes les espérances. Liberté du commerce et de la navigation, communications rapides soit à l’intérieur, soit avec l’étranger, encouragemens à l’agriculture, à la riche exploitation des mines, et des forêts, développement des enquêtes économiques et statistiques amélioration du système général des impôts, enfin liberté religieuse et égalité civile, pas une de ces utiles réformes n’était omise dans la harangue royale, et pour chacune d’elles le gouvernement du roi Oscar s’engageait à présenter aux délibérations de la diète une proposition.

Deux de ces réformes, les deux dernières, nous intéressent particulièrement. Elles touchent chacune à des questions d’ordre plus élevé que les faits matériels et économiques, à des questions d’ordre moral et religieux. Le roi Oscar a annoncé qu’il proposerait d’accorder aux femmes non mariées, à l’âge de vingt-cinq ans, leur majorité et la libre disposition de leurs biens. Ce ne serait que justice assurément, et cependant nous n’osons pas espérer que cette réforme, peu désirée en Suède des chefs de famille, soit adoptée sans résistance. Plus d’une fois déjà les hautes cours du royaume, consultées à ce sujet, ont répondu de manière à faire penser que les esprits ne seraient pas mûrs encore pour un si équitable changement. Il faut lire à cette occasion le nouveau livre de Mlle Frederika Bremer, son roman intitulé Hertha ou