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en prétendant que les Écritures n’avaient pas été faites pour enseigner aux hommes la science et la philosophie, en réunissant autour de lui ce qu’on pourrait appeler tous les libéraux de son temps. Sa longue persécution a servi sa gloire, et l’on croit vulgairement qu’il a découvert la rotation de la terre et l’immobilité du soleil au centre du monde, tandis qu’il a simplement présenté sur ce point une démonstration du système de Copernic.

Ce court résumé donne une vague idée, mais suffisante pour notre but, de ce qu’on savait du temps de Newton. Copernic avait découvert la preuve du système solaire, Kepler la courbe que décrivent les planètes et les règles de leurs mouvemens ; Galilée l’avait ajouté des lois importantes sur la chute des corps et le système tout entier des planètes secondaires. Copernic représente l’observation, Kepler le calcul, Galilée la mécanique ; mais il n’était jamais ou presque jamais question des causes de tous ces mouvemens harmonieux et éternels. Les uns croyaient à des anges cachés dans les corps célestes et les faisant mouvoir à leur gré, d’autres à une volonté toute-puissante et continue qui ne cessait d’agir sur eux et de les retenir dans leurs orbites, car il ne faut pas oublier qu’Il y a deux problèmes à résoudre, celui de la force qui fait mouvoir les planètes, et celui de la force qui les empêche de s’échapper par la tangente. Quelques-uns, Descartes surtout, croyaient à une attraction mutuelle des astres, mais ils ne savaient ni la démontrer ni l’expliquer ; d’autres enfin, Borelli peut-être le premier, avaient parlé de la gravité ou pesanteur comme d’une force qui pouvait attirer toutes les planètes vers le centre, et Hooke avait communiqué en 1666 à la Société royale de Londres des expériences sur le pendule et la détermination du poids des corps à des distances diverses de la terre. Rien de tout cela pourtant n’était certain, c’étaient des pressentimens que Newton devait convertir en vérités, car il était à la fois physicien, observateur, mathématicien et philosophe.

Il paraît tout naturel, quand on n’y a pas réfléchi, qu’un corps tombe s’il n’est pas soutenu, et cependant l’inertie de la matière étant admise par tous, rien ne devrait paraître plus singulier. Il n’est pas plus facile de concevoir philosophiquement un corps allant de haut en bas que de le concevoir allant de bas en haut, et si nous trouvons simple ce qui se passe chez nous, la même explication ne peut servir pour les antipodes. Bien plus, on sait qu’il existe une force centrifuge qui tend à faire éloigner du centre tous les objets placés à la surface d’un corps qui tourne. Ainsi, sur une sphère animée d’un mouvement de rotation, on ne peut rien placer ; ainsi une pierre dans une fronde tend sans cesse à s’échapper. Il paraîtrait donc naturel que tous les objets terrestres fussent lancés en l’air à tout instant, et avec une violence d’autant plus grande que leur masse est plus