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les a pas flattés. De là grande colère de certaines feuilles qui ont cru être plus particulièrement attaquées. M. Vollo s’est vu aussitôt poursuivi, condamné au nom des principes les plus contraires; mais toutes ces critiques étaient trop intéressées pour inspirer une grande confiance, d’ailleurs elles ont souvent porté à faux. Ce n’est pas à dire que l’auteur fût invulnérable : il est certain que les excès de la presse sont trop naturels dans les premiers temps qui en suivent l’établissement pour qu’il soit équitable de les lui imputer à crime. Que n’opposait-on à la vigoureuse, mais intempestive sortie de M. Vollo cette fine réflexion de Benjamin Constant! « On laisse, dit-il, quelques jours de liberté à la presse. Inexpérimentée, elle en abuse. On la supprime, lorsque le bon sens public et son propre intérêt allaient lui apprendre à se modérer. La voilà esclave. Elle devient forte, elle éclate, elle est libre, et les mêmes abus inévitables amènent les mêmes restrictions imprudentes. » En réalité, la comédie de M. Vollo n’a point la portée politique et sociale à laquelle elle semble prétendre : elle ne prouve rien contre les journaux, car la satire est trop violente; elle ne les rendra pas odieux, car personne ne s’y trompera; elle ne les corrigera pas, car aucun d’eux ne voudra se reconnaître dans un portrait ainsi chargé. Prenons cet ouvrage pour ce qu’il est, non pour ce qu’il veut être; n’y voyons qu’une étude exceptionnelle, que l’histoire d’un homme de cœur fortuitement réduit par la misère à vendre sa plume, et souffrant plus qu’on ne peut dire des mille intrigues qui s’agitent et se croisent autour de lui, jusqu’à ce qu’enfin, par un coup d’éclat, il ait reconquis son honneur et sa liberté. On prendra intérêt à cette peinture, on y reconnaîtra une part de vérité, on concevra qu’une récompense ait été donnée à l’auteur. A titre d’exception, le journaliste Wolfang n’est pas invraisemblable, et les personnages qui l’entourent, le ministre, le député, sa femme, sont des types bien observés et vivement rendus. L’un gouverne par les petits moyens, par l’intrigue et même par la corruption ; l’autre cherche à se faire un marchepied de sa propre bassesse, et sa digne compagne ne songe, en se mêlant aux affaires publiques, qu’à assouvir ses passions surannées et à augmenter son capital. Sont-ce là encore des exceptions? J’y consens; mais ces exceptions-là, nous les avons connues, et je crains bien que, si elles confirment la règle, ce ne soit pas dans le sens qu’on attache d’ordinaire à ce mot. Il est clair que, dans un naïf esprit d’opposition, M. Vollo a voulu peindre les mœurs constitutionnelles du Piémont, son pays; seulement les nécessités de la représentation, les exigences de la police, l’ont conduit à placer la scène dans la capitale d’un état allemand, — il ne s’explique pas avec plus de clarté sur le lieu de l’action, — et à donner à ses personnages des noms ridicules ou impossibles pour des oreilles et des bouches italiennes. Encore