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de dix-sept ou dix-huit ans, un programme d’examen qui puisse donner des gages de capacité future? Sera-ce l’éternel latin ou le sempiternel grec, une double infusion de géométrie, voire de calcul différentiel, qui indiqueront que tel ou tel sujet doit obtenir la préférence des examinateurs, qu’il possédera un jour les aptitudes si diverses indispensables à l’officier civil indien pour les fonctions multiples qu’il doit remplir dans sa carrière? Puisque au reste la compagnie des Indes est entrée à son corps défendant, mais est entrée enfin, dans la voie libérale du recrutement de son administration par examen, il en est un que l’on doit lui recommander instamment d’inscrire sur son programme : c’est l’examen de santé! Sous ces climats débilitans, au milieu de cette vie monotone et triste des stations indiennes, l’énergie morale dépend surtout du bon état des forces physiques. Malheureusement là encore la science divinatoire des examinateurs serait bien souvent mise en défaut, et tel hercule de dix-huit ans, admis par les médecins sur le certificat de ses larges épaules et de ses joues fleuries, viendrait s’étioler dans les plaines du Bengale, tandis qu’un enfant chétif et repoussé comme tel eût acquis sous le climat de l’Inde les dimensions d’un colosse.

Le nouveau règlement qui ouvre à la libre concurrence des examens les commissions civiles de l’Inde ne semble donc, nous le répétons, rien autre chose qu’une concession faite à l’esprit niveleur et anti-héréditaire du jour; nos sympathies ne sont pas avec lui, et nous devons souhaiter que l’Angleterre n’ait pas à déplorer amèrement une mesure qui n’a que les apparences du libéralisme. Le nouveau système a le grand inconvénient de rompre des traditions d’honneur, d’expérience, de dévouement à la chose publique, qui se perpétuaient dans un service en quelque sorte héréditaire, d’entamer, ne fût-ce que d’une pierre, tout au sommet ce merveilleux édifice de l’Inde, dont les bases sont si fragiles. Il a un plus grand inconvénient encore, celui de jeter à trois mille lieues de leur pays, au milieu des tentations de l’oisiveté et de la débauche, des jeunes gens qui ne se rattacheront par aucun lien à la communauté anglo-indienne, et qui ne seront pas soutenus, au grand jour du combat entre les passions de la jeunesse et le devoir, par des affections, des souvenirs de famille, ou les conseils de l’amitié.

La couronne et le board of control d’une part, la compagnie et la cour des directeurs de l’autre, tels sont les pouvoirs antagonistes qui se partagent le gouvernement de l’Inde. Viennent ensuite les hauts fonctionnaires qui composent le gouvernement proprement dit, et auxquels se rattachent diverses catégories d’agens qui relèvent de leur autorité.

Tous les pouvoirs de la cour des directeurs dans ses domaines d’outre-mer sont délégués au gouvernement suprême de l’Inde sié-