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a pu devoir aux habitudes polies et littéraires de ses émirs du xe siècle et ce qui a pu en rester dans le développement hâtif et brillant de ce pays au temps des rois normands et des empereurs de Souabe. L’influence musulmane au moyen âge n’a été la racine ni de la chevalerie, ni de l’architecture, mais à l’une et à l’autre elle a donné sa grâce et sa fleur.

L’appendice des Archives italiennes a aussi admis parfois, comme les Archives elles-mêmes, des dissertations sur quelque point controversé de l’histoire de l’Italie. Telle est la lettre de M. Gino Capponi à son savant ami M. Capei sur les Lombards en Italie. M. Capponi touche là, avec sa supériorité accoutumée, à une question très importante, l’origine des communes italiennes et en général des communes au moyen âge. Il se prononce nettement pour une origine purement romaine. Il déclare la commune, la cité, quelque chose d’étranger aux nations germaniques. Je pense qu’il a raison. Cependant, et dans un passage de sa dissertation lui-même semble l’admettre, il pourrait avoir existé en Italie deux sortes de communes, les unes, comme il dit, apportées par les Lombards et dominant dans les campagnes, les autres qui subsistaient dans les villes gouvernées par les Italiens selon l’ancien principe municipal romain. Les premières ne sont pas de vraies communes pour M. Capponi ; mais quoique leur origine n’ait rien de municipal, elles ont pu jouer plus tard un rôle analogue à celui des communes dont le municipe romain était la source. C’est ce qu’un savant illustre que la France vient de perdre, M. Augustin Thierry, pensait de plusieurs communes du nord de la France, dont il rattachait l’origine à la guilde, fédération usitée chez les nations germaniques. — M. Capei a répondu à la courtoisie de M. Gino Capponi, qui lui avait adressé cette dissertation sur les Lombards en Italie, par une autre dissertation où il discute avec la rare netteté de son esprit et sa science de jurisconsulte quelle portion du droit romain a pu rester aux Italiens sous la domination des Lombards ; il reconnaît cette persistance pour le droit romain privé, et aussi pour les institutions municipales, bien que restreintes et grandement altérées par des maîtres barbares. — Le grand travail de M. Galvani sur les origines de l’Italie et par suite sur l’histoire de la langue latine ne peut qu’être mentionné ici comme un essai savant et ingénieux, sans qu’il soit possible d’entrer dans la controverse que soulèvent les opinions particulières de M. Galvani.

J’ai dit que la nouvelle série des Archives contenait à la fois des documens inédits et des travaux de critique plus développés en général que ceux de l’ancienne série. Les cinq livraisons qui ont paru présentent une heureuse combinaison des deux élémens qui composent le nouveau recueil. Parmi des textes publiés pour la première fois, on trouve des études remarquables de MM. de Reumont,