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LA NÉERLANDE
ET
LA VIE HOLLANDAISE

VIII.
LES JUIFS EN HOLLANDE.


Il existe un peuple mystérieux, bien digne d’appeler l’attention des historiens et des moralistes. Né dans le désert, la caravane est son emblème. Il a bu l’eau de tous les fleuves, depuis les ondes tièdes du Nil et de l’Euphrate jusqu’aux ondes glacées de la Néva. Il a suspendu sa lyre, détendue par les pleurs de l’exil, aux palmiers de Babylone, aux chênes de la Gaule et aux noirs sapins de la Norvège. Il est partout et toujours, comme le Dieu de Moïse. Il a bâti les pyramides, il a vu crouler le Parthénon. Sa vie religieuse, politique et civile était concentrée dans le temple de Jérusalem ; le temple est tombé, et lui subsiste encore. Sans patrie, il adopte les mœurs, les coutumes des civilisations qu’il traverse. Tel il figure sur les monumens de l’antique Orient, tel on le retrouve aujourd’hui. Il emprunte quelquefois aux peuples du nord leurs cheveux blonds, leurs yeux bleus, leur mate blancheur ; mais il conserve sous toutes ces transformations locales son ineffaçable caractère, ses traits sémitiques, son grave et vigoureux profil. Ses chants, mêlés aux cérémonies de bien d’autres cultes, remplissent l’univers. Toujours proscrit, toujours debout, il se montre supérieur à ceux qui l’oppri-