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Phidias. L’auteur de cette charmante statue serait donc Philiscus.

Toujours dans l’intention de rendre sa famille populaire en attachant les noms des siens à des monumens d’agrément ou d’utilité, Auguste donna celui de Livie à un portique et à un marché. Le portique qu’il dédia à Livie peu de jours avant de mourir, peut-être empoisonné par elle, il l’avait érigé en l’honneur de ses petits-fils Caïus et Lucius César, dont il inscrivit aussi les noms sur la basilique commencée par César, et qu’il appela Julia. Il voulait ainsi rattacher sa race à César. Il appela bois des Césars ceux qu’il avait plantés sur la rive droite du Tibre, et où étaient des boutiques et des lieux de divertissemens ; il fallait que le souvenir et le nom de César fussent mêlés à toutes les joies du peuple. Enfin, si Auguste s’abstenait de dédier en son nom les édifices qu’il réparait, il donna du moins ce nom à un marché à la viande, autrement dit une boucherie, sans craindre que le mot fît penser au triumvirat. On croit que l’église de Saint-Étienne-le-Rond est bâtie, sur l’emplacement du Macellum Augusti. S’il en est ainsi, les supplices des martyrs, hideusement représentés sur les murs de cette église, rappellent ce qu’elle a remplacé.

Auguste, qui évitait tout ce qui eût pu lui donner l’apparence de l’orgueil, ne construisit pour son usage qu’un grand monument, et ce fut un tombeau. Il semble avoir pensé comme les Égyptiens, qui, — suivant Hérodote, ainsi que le prouve la grandeur des pyramides, qui furent de vastes sépulcres, — bâtissaient des maisons fragiles, parce que la vie est passagère, et des tombeaux durables, parce que la mort dure toujours. Celui qui se contentait pour y vivre de la modeste maison du Palatin voulut reposer dans un mausolée magnifique, pour se donner du moins après sa mort toutes les splendeurs et comme toutes les joies extérieures du despotisme après s’en être privé par prudence durant sa vie.

Le mausolée d’Auguste, dont le noyau existe encore, caché dans un coin de Rome, et dont la justice du sort a fait un théâtre, était une magnifique sépulture orientale. On y reconnaissait la pensée de ces grands monumens funèbres de l’Orient, le dessein d’imiter les sépultures héroïques des temps primitifs, en élevant une montagne sur un cadavre ou un peu de cendre. Le mausolée d’Auguste rappelait cette origine ; c’était une montagne, en pierre il est vrai, mais le sommet était couvert de terre et planté de grands arbres. Tout autour s’étendait un bois sacré qui servait de promenade ; à l’entrée s’élevaient deux obélisques, placés là, comme ils étaient en Égypte à la porte des palais ou des temples, et exprimant, par la valeur qu’avait l’obélisque dans l’écriture égyptienne, l’idée de stabilité. C’était comme si on eût écrit à toujours sur la façade du monument.

Ces deux obélisques existent encore à Rome, l’un derrière l’église de Sainte-Marie-Majeure, l’autre entre les deux colosses de Monte-