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au moment où la campagne venait de finir, et elle avait duré sept mois. D’ailleurs Pline parle aussi, à propos de la bataille de Philippes, d’une certaine fuite et de trois jours employés à se cacher dans les marais. On doit reconnaître qu’Octave montra, durant les guerres civiles une certaine activité et une certaine intelligence militaires, qui semblèrent l’abandonner quand il fut empereur. On dirait qu’ayant fait la guerre pour arriver au but de son ambition, il en perdit le goût quand il ne s’agissait plus que de la gloire.

Auguste voulut guerroyer en Espagne contre les Cantabres ; mais, la foudre ayant frappé un esclave qui marchait près de sa litière, il se hâta de revenir à Rome, laissant battre les Cantabres par Statilius Taurus, dont la victoire procura à Auguste une fois de plus le titre d’imperator. L’arc de triomphe qui lui avait été élevé pour avoir triomphé d’une femme, de Cléopâtre, cet arc de triomphe peu glorieux n’existe plus. Un autre monument de ses campagnes, lequel a également péri, l’était encore moins ; il se rapportait à son expédition chez les Cantabres et à la manière un peu brusque dont il la termina. C’était le temple érigé par lui à Jupiter Tonnant[1] en mémoire de la peur qu’il avait eue en Espagne ; on peut se servir de cette expression, car Suétone nous apprend qu’Auguste redoutait beaucoup le tonnerre et les éclairs, qu’il avait toujours sur lui, pour s’en préserver, une peau de veau marin, et qu’il s’allait cacher pendant l’orage dans une chambre bien voûtée.

Le tonnerre n’était pas le seul ennemi qu’Auguste redoutât. Craignant le sénat, qui pourtant n’était pas bien dangereux, il y venait cachant une cuirasse sous ses habits, et se faisait entourer de dix sénateurs très dévoués et très robustes. Un jour, avant qu’il fût empereur, le peuple s’était soulevé contre lui et contre Antoine. Antoine tint bon, mais Octave se jeta à genoux, déchira ses vêtemens et demanda grâce ; le peuple l’épargna.

Octave, devenu empereur, n’a pas été un grand général ni peut-être même un très bon soldat : a-t-il été au moins un grand législateur ? Ici je serai très court, parce que les monumens de Rome, objet spécial de mon étude, ne peuvent m’offrir aucun document à cet égard. En législation comme en architecture, Auguste fut le continuateur de César. Les lois qu’on leur attribue à tous deux portent également le nom de lois juliennes (Juliœ), et il est souvent difficile d’y faire la part de l’oncle et celle du neveu, à peu près comme on a discuté sur ce qui appartenait à chacun d’eux dans la basilique Julia.

Auguste n’a attaché son nom à aucune révision ou refonte générale des lois, ni même à aucune grande collection comme celles de

  1. Les trois colonnes qui ont longtemps porté ce nom n’y ont aucun droit, car le temple de Jupiter Tonnant était sur le Capitole, in Capitolio, ce qui ne veut point dire au pied du Capitole.