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que les retours du Japon ne peuvent se faire qu’au moyen du cuivre, et qu’une trop forte quantité de ce métal non vendue laisserait de trop grands capitaux inactifs et tendrait à en faire baisser le cours, nous pensons que le commerce du Japon doit avoir des bornes calculées sur les débouchés de l’Inde, etc. » La compagnie fit rechercher par ses employés de Décima si le motif de l’épuisement des mines était sérieux. Les renseignemens recueillis alors donnèrent comme produit total A8,000 quintaux, dont une partie passait aux Hollandais et aux Chinois, et l’autre à l’usage du pays. Si ces données étaient exactes, ce qui est incertain, les Japonais avaient raison de prendre des mesures restrictives.

Le gouvernement hollandais avait blâmé la conduite des directeurs de la factorerie, les accusant d’avoir provoqué le désastreux décret de 1743 par leurs tolérances et leurs faiblesses ; mais la difficulté était de faire sortir la factorerie du triste état où la plaçait le dernier décret. Les moyens qu’on employa ne firent que l’aggraver : c’est en effet vers cette époque (1744) qu’eut lieu entre la chambre du trésor de Nagasaki[1] et la factorerie un traité qui fut pour les Hollandais la plus fatale des combinaisons. Il fut convenu que tous les ans la chambre impériale du trésor remettrait au chef de la factorerie une note détaillée de toutes les marchandises qui evraient être apportées et livrées l’année suivante : les prix en étaient arrêtés à l’avance, ainsi que les quantités de chaque marchandise. Par contre, la chambre da trésor s’engageait à en payer le montant avec une quantité de cuivre déterminée, et dont le prix fut arrêté une fois pour toutes à raison de 12 theils, 3 mas et 5 condarins le pikol[2], autrement dit, au cours d’alors environ 49 francs 40 c. les 60 kilogrammes. Le solde des comptes se réglait avec de l’or, et plus tard avec une certaine quantité de camphre, quand l’exportation de l’or fut interdite vers l’année 1752. La chambre du trésor exigeait surtout que les assortimens des marchandises répondissent aux commandes, et c’est cette condition qui a causé de perpétuelles

  1. La chambre impériale du trésor de Nagasaki est une banque de commerce considérable, en dehors de laquelle les Hollandais et les Chinois ne peuvent traiter aucune affaire.
  2. Les calculs se font au Japon en theils ; c’est une valeur fictive qui n’a pas de signe représentatif. Rien n’est plus difficile que de l’évaluer d’une manière rigoureuse, et Meylan se trompe (page 7) en disant que le theil vaut toujours florin 1 65 ou fr. 3 80 à fr. 3 40. Au XVIIe siècle, il a valu au-delà, de fr. 6 ; au XVIIIe, fr. 5 75, et finalement fr. 4 environ. Le change de Java sur Amsterdam et Paris doit servir de règle pour ces calculs. Ainsi en 1844 le theil ne valait en réalité que fr. 2 70, en 1843 fr. 3 20, aujourd’hui fr. 3 55. Dans toutes les évaluations que j’ai faites, j’ai tenu compte, autant que possible, des cours des diverses époques dont je parlais. Le theil vaut dix mas, le mas dix condorins. Le mas est le type qui règle véritablement le cours des monnaies.