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MAURICE DE TREUIL.

— J’ai mon projet... Des murs rustiques à l’extérieur avec le même lierre, les mêmes gros poiriers, le même chaume piqué d’iris en fleurs ; au dedans un boudoir, un nid ; de la brocatelle et du bois de rose.

— Ce sera ravissant.

— Adieu à présent. . .

— Vous nous quittez déjà !

— Eh ! ma chère, j’ai vingt courses à faire ; je me suis oubliée chez vous... J’emporte ma chaumière, et je jette en passant un mot chez mon architecte... N’oubliez pas mes vendredis, je vous ai annoncées à tous mes amis ; ce serait un désespoir si vous ne veniez pas... Mille bonjours à M. Maurice... A propos, que voulez -vous que je dise de votre part à M. de Courtalin ? Un petit mot, un rien ; égratignez-le, mais ne le tuez pas... A votre prochaine visite chez moi, il aura dix rivaux... Bonsoir, je me sauve ! Deux ou trois heures après cette visite, on pouvait voir Maurice furetant sur tous les meubles, soulevant tous les rideaux, cherchant partout, et frappant du pied chaque fois qu’en parcourant une chambre dans tous les coins, il ne découvrait ni cadre ni toile. — Cependant ce diable de tableau était bien ici ce matin, je l’ai vu, de mes yeux vu ! murmurait-il entre ses dents. Où l’a-t-on fourré ?

— Et il sondait les armoires et les cabinets pour voir s’il n’était pas caché sous quelque robe. Les domestiques questionnés se souvenaient bien d’avoir vu un tableau quelque part, mais ils ne savaient pas ce qu’il était devenu.

Au plus fort de cette recherche, Sophie et M""^ Sorbier revinrent d’une course qu’elles avaient faite pour jeter une carte.

— Eh ! mon Dieu ! que cherchez -vous là ? dit Sophie en surprenant Maurice à genoux regardant sous un canapé.

— Pardieu ! dit Maurice, qui commençait à s’impatienter, je cherche un tableau.

— Quel tableau ?

— Le paysage qui était là ce matin, sur ce fauteuil.

— Ah ! cette petite chaumière avec des canards,... dit M°" Sorbier.

— Justement.

— Ne cherchez plus, nous l’avons donnée.

— Comment donnée ?

— Et oui ! donnée, c’est assez clair... Vous me regardez là avec des yeux tout étonnés.

— Mais à qui avez vous fait ce beau cadeau ?

— A une très jolie femme,... dit Sophie, un peu inquiète du tour que prenait la conversation.

— Elle a un nom, j’imagine, cette jolie femme ?