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et cependant on pourrait citer de très pieux et même de très habiles écrivains qui ont soutenu des principes rigides sur la justification sans faire preuve d’une adhésion complète à la divinité absolue du justificateur.

L’église épiscopale, ainsi qu’on l’a déjà vu, peut se croire à l’abri de toute indécision à cet égard, non-seulement par les deux premiers des trente-neuf articles qui expriment la pure doctrine trinitairienne, mais par l’article VIII, qui prescrit de recevoir et de croire en entier les trois symboles. Or dans le nombre, outre le symbole des apôtres, il y a celui de Nicée, dont les expressions sont formelles ; il y a surtout le Credo d’Athanase, qui ne laisse guère d’issue à une hérésie dérobée. On sait que cette antique confession, qui, sans être l’œuvre du grand évêque dont elle porte le nom, est acceptée et enseignée dans notre église, contient, avec une énonciation très didactique des élémens du dogme de la Trinité, l’affirmation trois fois répétée que la croyance à la Trinité et à l’incarnation, telles qu’elle les exprime, est indispensable à quiconque veut être sauvé, quicumque vult salvus esse. Or l’obligation de souscrire à ces conditions inexorables du salut est encore imposée de par la reine Elisabeth à quiconque veut être non-seulement sauvé, mais gradué en théologie, et cette obligation serait devenue bien pénible pour la sincérité, si, précisément parce qu’elle est pénible, on n’avait trouvé des biais pour s’y conformer sans engager sa conscience, c’est-à-dire des moyens décens de n’être pas sincère. Sous peine de damnation éternelle, on déclare souscrire à une confession de foi dont les termes sont incessamment éludés par tous les artifices de la prédication et de l’enseignement. Il est donc bien concevable que non-seulement Tillotson, mais le docteur Waterland lui-même, un des plus célèbres et peut-être le plus habile des défenseurs anglicans du dogme de la Trinité, aient exprimé le désir de voir l’orthodoxie délivrée du Credo d’Athanase. Baxter a protesté n’en accepter que ce qui touche l’essence du dogme, non la condamnation prononcée contre l’erreur. Blackburne n’a consenti d’abord à le signer qu’en le restreignant, en l’annulant peut-être par le sixième des trente-neuf articles, qui défend de rien exiger comme article de foi en dehors de l’Écriture sainte, puisqu’elle contient tout ce qui est nécessaire au salut. Arnold n’accepte les trois symboles que comme témoignages historiques de l’antique foi de la société chrétienne, et il n’entend par là que s’engager en faveur de l’église universelle contre toutes les hérésies, depuis Arius jusqu’à Socin. La restriction mentale a donc presque toujours accompagné l’adhésion obligée aux formules d’Athanase, et, après avoir obéi à cette contrainte légale, on l’a souvent discutée ; mais comme elle résulte de statuts organiques, on ne la