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des points dont l’éloignement de l’équateur diffère de 20 degrés latitudinaux ou de 500 lieues. D’un autre côté, le mois de janvier est aussi froid à Halifax (lat. 49° 39’) qu’au Cap-Nord (lat. 71° 40’), à Christiania (lat. 59° 55’), à Azov, Russie méridionale (lat. 47°), et à Peking en Chine (39° 54’). On ressent donc en moyenne pendant le mois de janvier un froid aussi rude à Peking, situé dans la partie méridionale de l’Asie centrale, qu’au Cap-Nord, le promontoire le plus reculé de la Laponie. Ces deux points sont situés à 31 degrés latitudinaux l’un de l’autre, ou à 775 lieues comptées sur un méridien terrestre. Les chiffres qui précèdent suffisent pour montrer l’importance de ces données pour la géographie botanique. L’incroyable diversité des climats, — les uns extrêmes, caractérisés par des étés brûlans et des hivers rigoureux, — les autres égaux, à hivers doux suivis d’étés sans chaleur, — les saisons intermédiaires, le printemps et l’automne, disparaissant ou empiétant sur les autres, — le régime si différent des pluies, les alternatives de sécheresse ou d’humidité, tous ces élémens, modifiés et combinés de mille manières, semblent avoir fait sortir du sein de la terre la riche végétation dont elle est diaprée. C’est ainsi que M. de Humboldt généralise et précise en même temps les lois climatologiques entrevues par Arthur Young. L’échelle de végétation tracée par Giraud-Soulavie sur la pente des humbles Cévennes, il l’étend au Chimborazo, au Caucase, aux Pyrénées, aux Alpes suisses et laponnes, en déterminant les lois du décroissement de la température suivant la hauteur le long des pentes abruptes, des sommets isolés, ou des contre forts adoucis des grands massifs de montagnes.

Quand il écrivit son ouvrage, M. de Humboldt n’avait pas visité les contrées septentrionales de l’Europe ; mais deux de ses contemporains les explorèrent dans un esprit qui était le sien. Le premier est George Wahlenberg : compatriote et disciple de Linné, il visite la Suède septentrionale, la Norvège et la Laponie dans les premières années du siècle ; puis, désireux de comparer la flore du nord de l’Europe avec celle des Alpes de la Suisse, il parcourt en tous sens le groupe de montagnes qui entoure le lac des quatre cantons et celles du canton d’Appenzell. À mesure qu’il s’élève sur leurs flancs, il retrouve les plantes de sa patrie, et à la limite des neiges éternelles il salue avec émotion les humbles, mais charmantes fleurs qu’il avait cueillies au bord de la Mer-Glaciale. Non content de cette comparaison, il veut voir encore les Carpathes. Situées sur les confins de l’Asie, ces montagnes lui offrent une végétation spéciale analogue, mais non identique à celle des Alpes et des régions polaires. Le nord de l’Europe, que Linné et Wahlenberg avaient décrit en botanistes, un ami, un compatriote de M. de Humboldt, Léopold de Buch, l’explorait en géologue et en météorologiste. Son voyage, entrepris