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convenablement de moi, qui ne puis être atteint d’aucune partialité. Je sens que dès aujourd’hui le pays, et dans l’avenir la postérité, en comptant les noms des grands hommes d’état qui ont orné l’histoire de l’Angleterre, placeront celui de sir Robert Peel parmi les plus éminens. »

Un tel hommage, presque également beau pour celui qui en était l’objet et pour celui qui le rendait, méritait une réponse encore plus rare ; elle ne se fît pas attendre. L’un des plus intimes amis de sir Robert Peel, son chancelier de l’échiquier dans ses deux administrations, et désigné par lui comme l’un de ses exécuteurs testamentaires, M. Goulburn, prit la parole : « Je ne me lève point pour rien ajouter, je ne pourrais le faire, au témoignage que le noble lord vient de rendre aux mérites de mon ami si profondément regretté… Je ne veux qu’exprimer au noble lord et à la chambre les sentimens des amis et de la famille de sir Robert Peel sur la proposition que vient de faire le noble lord. Je l’accepte en leur nom avec la plus vive reconnaissance, comme une preuve de la gracieuse disposition du souverain à reconnaître les mérites d’un grand serviteur public, et comme la plus haute marque d’estime que la chambre des communes puisse lui donner. Je parle non-seulement en mon propre nom, mais au nom de la famille de sir Robert Peel, quand je dis que je ressens jusqu’au fond du cœur l’honneur d’une telle proposition suggérée par la couronne et accueillie par le sentiment général de la chambre ; mais qu’on me permette de le dire, ceux qui n’ont pas été liés avec sir Robert Peel connaissent peu la simplicité de son caractère. Si jamais il y a eu un homme remarquable par son désir d’éviter l’ostentation et la pompe, c’est sir Robert Peel, et il détestait surtout la pompe et l’ostentation dans les cérémonies funèbres… Je lirai à la chambre une instruction qu’il écrivait le 8 mai 1844, quand il était dans la plénitude du pouvoir, à la tête d’un grand parti, et quand les mesures qu’il avait proposées au parlement étaient couronnées d’un succès qui surpassait même son attente : — Je désire être enseveli dans le caveau de l’église paroissiale de Drayton-Rassett, où reposent mon père et ma mère, et que mes funérailles aient lieu sans pompe ni éclat d’aucune sorte. — Et ce sentiment n’avait subi aucune altération, car il y a six semaines, comme on venait de faire quelques changemens dans l’église de Drayton-Rassett, sir Robert montra à lady Peel la place même où il désirait que son corps fût déposé dans le caveau, répétant qu’il ne voulait ni ostentation, ni pompe. En de telles circonstances, la chambre sentira, j’en suis sûr, que je n’ai qu’un devoir à remplir, et que la famille de sir Robert Peel n’a qu’un vœu à former : c’est d’exprimer la plus profonde reconnaissance pour l’intention qu’a eue sa majesté de confé-