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la vaste enceinte de la basse église, le parti de la haute église, transformé suivant le temps, couvrant d’une couche plus épaisse de religion formaliste et littérale les préjugés politiques de Sacheverell et d’Atterbury, a prétendu restaurer l’anglicanisme dans sa pureté. Au dogme calviniste de la justification par la foi, ils ajoutent ces opinions plus humaines, plus pratiques, dont une église visible ne saurait se départir aisément. Les œuvres, les cérémonies, la hiérarchie, la succession apostolique leur sont plus chères que les principes dogmatiques de la réforme, et, jaloux de propager cette traduction plus mondaine de la spiritualité protestante, ils ont su reprendre une influence légitime en servant mieux la société. Sans rigorisme dans les mœurs, ils se plient aux nécessités de la vie sociale avec une facilité qui rappelle un peu la politique des jésuites; ils ont contribué à l’amélioration du clergé, à celle des écoles, achetant par des œuvres utiles le droit d’exiger une soumission facile à leurs principes d’autorité et de liturgie. Ils ont ainsi entr’ouvert la porte par où quelques-uns d’entre eux se sont échappés jusqu’au papisme. C’est là le parti religieux qui, exagérant le principe de l’autorité, tend à diviniser le pouvoir de l’église, et qui a entrepris de convertir son siècle par des traités connus sous le nom de Tracts for the Times. C’est là le schisme des tractariens, soutenu par un ou deux évêques et par quelques jeunes membres du clergé, assez comparables d’esprit et d’humeur aux néo-catholiques, d’autant plus ennemis toutefois du catholicisme qu’ils en sont plus rapprochés. En même temps qu’ils cherchent à charger le culte et la foi d’accessoires étrangers à la spiritualité primitive, et dont s’étonne le vrai protestantisme, ils se qualifient d’anglo-catholiques, et ne reconnaissent qu’à regret l’autorité de leurs supérieurs, qu’ils trouvent trop engagés dans les voies du gouvernement civil, et plus près de l’érastianisme que de la pure doctrine du pouvoir sacré de l’église apostolique. C’est une petite église affectée d’un dilettantisme religieux, qui a cependant donné naissance à une controverse très animée, tractarian controversy.

Le fond du clergé, le gros de l’arbre, comme disait Bayle, c’est la masse de la basse église, composée des évangéliques modérés, touchant par leurs extrémités aux sabbatariens, aux recordites et aux méthodistes, et de ce clergé de sens commun, tolérant comme son temps, libéral comme son pays, héritier des latitudinaires, et qui, par son extrémité, pourrait bien effleurer l’arianisme et le scepticisme. Ce qui est certain, c’est que toute cette église, en y comprenant ses ramifications diverses, a montré depuis trente ans une vitalité, une activité qui lui font honneur. Grâce à elle, des temples ont été bâtis en grand nombre. Par son influence, par ses conseils, à son instigation, des institutions religieuses et philanthropiques ont