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Price avait, dès 1786, publié des sermons en faveur de l’arianisme, quoiqu’il prît soin de se distinguer des nouveaux unitairiens, et que, en religion comme en philosophie, il ne s’accordât pas de tout point avec le docteur Priestley, son ami. Il mourut à Hackney, près de Londres, en 1791, pasteur d’une congrégation de sa croyance.

Déjà depuis plusieurs années des chapelles du nouveau culte avaient commencé à s’élever librement. En 1774, les révérends Lindsey et Disney avaient publiquement abandonné leurs fonctions et leurs dotations dans l’église établie, pour devenir les pasteurs libres d’un troupeau unitairien. Un service divin spécial fut institué avec cette doxologie due au docteur Clarke : « Gloire à Dieu par Jésus-Christ, son seul fils immortel, » et la première chapelle unitairienne fut bâtie à Londres en 1778. En ce moment, un homme diversement célèbre, le docteur Priestley, sur qui ses découvertes en physique et en chimie avaient attiré l’attention publique, converti à la nouvelle doctrine par la lecture de Lardner et ses propres méditations, avait quitté le ministère sacré pour suivre à Londres le mouvement des sciences et de la politique. Son esprit puissant, mais léger, se portait avec succès sur les objets les plus différens. Il avait en tout des pensées plus originales que profondes, beaucoup de vues diverses, rien de définitif et d’achevé; mais il savait élever des questions, provoquer des recherches, agiter les esprits, et son Histoire de la corruption du Christianisme suscita une vive controverse, dans laquelle commença la réputation de Horsley parmi les défenseurs de la tradition. Lié avec Franklin, reçu chez lord Lansdowne, qui le fit son bibliothécaire, Priestley, ainsi que presque tous les dissidens, avait pris parti pour la révolution d’Amérique. Ami du docteur Price, quoiqu’en métaphysique ils fussent peu d’accord, et qu’ils se soient combattus sur la question du libre arbitre, il fut son successeur dans la congrégation de Hackney, et, comme lui enthousiaste de la révolution française, il s’attira des persécutions qui le forcèrent enfin à quitter sa patrie.


VIII.

La révolution française ne pouvait manquer d’émouvoir diversement tant de sectes mises en regard les unes des autres. Elle fit éclater ce que les Anglais appellent encore le coup de tonnerre de Burke, et aussitôt tout ce que la sagesse ou le préjugé, la crainte ou la prudence, l’honnêteté ou l’orgueil rallia sous le drapeau conservateur devint défiant, ombrageux, si ce n’est hostile, à l’endroit des séparatistes de toute nuance, et les idées de tolérance perdirent du terrain, abandonnées de quelques-uns de leurs plus éclairés défenseurs.