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surtout l’abolition de la traite et de l’esclavage, devinrent l’objet de leur pieuse activité et de leur savoir-faire apostolique. Le nom de Wilberforce se présente aussitôt à l’esprit. Wilberforce fut en effet le chef de cette noble école religieuse, et il l’introduisit dans le parlement, où il parvint à lui donner une influence politique. Episcopal, mais libre et zélé, conservateur, mais ami de toute réforme morale, il sut se faire compter de M. Pitt, et plus d’une fois ses remontrances consciencieuses et ses saintes exigences impatientèrent ces tories dédaigneux qui ne connaissaient que la force et l’utilité, même quand la révolution française les eut ralliés par intérêt à la religion constituée. Les airs d’incrédulité tombèrent alors en discrédit, sans que le vrai zèle et la vraie foi en fussent mieux compris. Une orthodoxie de calcul et d’affectation, sérieuse comme opinion politique, superficielle comme opinion religieuse, composa ce qu’on appelle encore le système eldonite, en souvenir du vieux chancelier lord Eldon, aussi grand ennemi des catholiques que des jacobins, et cette sorte d’hypocrisie sincère qui accompagne les réactions prit une puissance odieuse à quiconque avait conservé quelque étincelle de l’esprit libéral de la révolution de 1688. Le parti évangélique sut profiter de ce retour, de cette mode ou de cette tactique, sans jamais, à son grand honneur, se confondre dans cette dévotion de circonstance. J’ai eu le bonheur d’approcher dans ma jeunesse un des derniers et des plus vénérables représentans de l’ancien parti évangélique. C’était un homme éminent par la piété, la bienveillance, le zèle et les lumières, qui dirigea pendant longtemps un recueil périodique d’une certaine influence, the Christian Observer, et qui a attaché son nom à toutes les œuvres qui ont illustré celui de Wilberforce. C’était le père du grand historien, du grand écrivain que possède l’Angleterre : c’était M. Zacharie Macaulay.

En présence de ces divers partis, l’église à titres et à domaines, les évangéliques, les méthodistes, et ces dissidens de toute nuance, presbytériens, indépendans, quakers, baptistes, qui se ranimaient par émulation pour les œuvres de charité réformatrice, et que secondaient souvent les philanthropes utilitaires, nous devons maintenant placer les unitairiens que nous avons laissés à l’époque du docteur Lardner. C’est alors qu’ils commencèrent à devenir une communauté. Exceptés originairement de l’acte de tolérance rendu sous Guillaume III, ils avaient plus d’une fois essayé de se faire reconnaître sur le même pied que les autres dissidens, et peu de temps après l’avènement de la maison de Hanovre, ils avaient à cette fin signé une pétition que fit repousser lord Nottingham, alors ministre. Les lois qui sanctionnaient l’orthodoxie par des interdictions contre les non-conformistes demeuraient en vigueur, et elles se sont perpétuées