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banlieues des villes passeraient de gré à gré avec les propriétaires seraient conclus au moins pour le terme de neuf ans. — Les contrats pourraient être conclus de commune à propriétaire, ou isolément par chaque cultivateur. — Si un village tout entier ou un ou plusieurs de ses habitans cultivaient ou prenaient à usage des terres sans avoir préalablement établi les conditions du fermage avec le propriétaire, ils seraient censés avoir accepté les clauses du contrat normal, et seraient tenus de l’exécuter littéralement. — Les contrats passés de gré à gré ne pourraient sous aucun prétexte dépasser les clauses du contrat normal. Le cultivateur conserverait en tout temps le droit de faire résilier les contrats qui seraient moins avantageux pour ses intérêts que les conditions du contrat normal ; mais dans le cas où le propriétaire consentirait des baux à ferme dont les clauses seraient moins avantageuses pour lui que celles du contrat normal, ces baux seraient maintenus[1].

À côté de ces réformes sociales, il est une réforme financière que nous croyons également urgente. Nous voulons parler de l’abolition de la capitation. Dans la pensée et dans les intentions des auteurs du règlement organique, la capitation était une amélioration considérable pour le paysan. En effet, avant la mise en vigueur du règlement organique, l’impôt personnel était le véritable tyran du paysan. Cet impôt se percevait d’après le système des louds. Le loud était une réunion, un groupe de familles ; cinq ou six familles formaient un loud et devaient payer 700 piastres ; mais ce système ouvrait une large voie à l’arbitraire. Les paysans ne savaient jamais ce qu’ils devaient payer ; il dépendait des administrateurs et sous-administrateurs d’étendre ou de restreindre ce loud. Dans certains villages, les paysans étaient écrasés et ruinés par les agens du fisc, qui les réduisaient à la plus affreuse misère ; dans d’autres, protégés par des boyards influens. Une des belles terres de la Valachie appelée Mogochoa, et située non loin de Bucharest, ne payait qu’un demi-loud (350 piastres), tandis qu’elle aurait dû acquitter une somme peut-être décuple. Ce système, notamment de 1827 à 1830, avait tari les revenus publics, causé une misère inouie, fait disparaître la nation imposable. Il était urgent de rétablir la confiance afin de pouvoir faire renaître le travail. La capitation avait le mérite d’être un impôt simple, uniforme, modique, et qui mettait aisément le paysan au fait de ce qu’il devait payer. Cet impôt fut adopté ; seulement, comme dans cet impôt il y a l’inconvénient des non-valeurs

  1. On voit qu’il s’agit d’une part de favoriser de toutes les façons la liberté des transactions, et de l’autre de protéger ouvertement le paysan dans le passage du régime du privilège au régime de l’entière liberté. Nous pensons que c’est là du libéralisme bien entendu dans l’intérêt de toutes les parties.