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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 août 1856

Quelle est en ce moment la vraie situation de l’Europe ? Peut-être serait-il assez difficile de la caractériser avec quelque précision. La paix est évidemment partout, l’envie de reprendre les armes n’est nulle part, les complications sérieuses se sont évanouies, et cependant il y a des malaises intimes, indéfinissables, que les polémiques exagèrent souvent par un reste d’habitude belliqueuse, mais qui n’existent pas moins au fond, et se manifestent par des faits palpables. Si on se tourne vers l’Orient, il y a un ensemble de petites difficultés qui se succèdent dans cette transition de la guerre à la paix, au sujet de l’application du traité conclu à Paris entre la Russie et les puissances européennes. Des vaisseaux anglais rentraient même il y a peu de jours dans la Mer-Noire, comme pour attester que les forces alliées n’étaient point encore absentes de ces contrées. Si on se tourne vers l’Italie, il y a dans certains états, à Naples surtout, un travail suivi de négociations marchant lentement vers un succès qui n’aura point été obtenu du premier coup. Si on se tourne enfin vers l’Espagne, qui est venue à son tour attirer tous les regards de l’Europe, la crise soudaine et violente qui éclatait il y a un mois n’est point tellement apaisée, qu’elle ne laisse encore le gouvernement victorieux dans des perplexités singulières. Suivons donc ces incidens, qui sont comme les nuages de la politique dans un moment où les grandes affaires ont cessé d’être l’unique et absorbante préoccupation des cabinets. Et d’abord, on ne peut disconvenir qu’il ne se soit élevé depuis quelque temps des divergences dans l’interprétation du traité qui a mis fin à la guerre d’Orient. Ces divergences étaient-elles la suite inévitable de stipulations peu précises qui ne pouvaient tout prévoir et descendre dans tous les détails ? Ont-elles été provoquées par la subtile ténacité de la Russie, par