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ses phases deviennent et plus nombreuses et plus tranchées à mesure qu’on l’étudié dans les régions plus bas placées du règne animal. Chez les articulés, elle n’est qu’une exception ; elle devient la règle chez les rayonnés, et c’est sans doute chez les infusoires qu’elle atteint son maximum de développement.

À mesure qu’elle se complique, la métamorphose rend plus complexe l’idée que le naturaliste est obligé de se faire de chaque espèce. Chez les animaux à transformations, cette idée est assez simple. Les grandes modifications se passant hors de notre vue, nous n’avons guère à combiner que les traits résultant des changemens de livrée des jeunes et des différences qui distinguent le mâle de la femelle. Dans les espèces à métamorphoses proprement dites, la difficulté s’accroît. Chez les insectes, il faut connaître la larve, la nymphe et l’animal parfait, toujours mâle et femelle. Chez le taret, il faut tenir compte de formes tout aussi tranchées, mais plus variables encore. Enfin, chez les animaux à généagénèse, pour con naître une seule espèce, il faut parfois embrasser les caractères de quatre ou cinq êtres parfaitement dissemblables de forme et de manière de vivre. Si l’expérience n’avait parlé, qui aurait soupçonné le distome sous ses formes de larve ciliée, de sporocyste, de cercaire libre, de cercaire enkistée ?

Sous la forme de généagénèse, la métamorphose a dû non-seulement rendre plus complexe l’idée que l’esprit conçoit de telle ou telle espèce, mais encore modifier profondément les notions acquises sur l’espèce considérée abstraitement et d’une manière générale. Jusqu’ici on avait entendu par ce mot une succession d’êtres procédant directement les uns des autres, et dont l’individualité persistait à travers un nombre quelconque de changemens plus ou moins apparens. Aujourd’hui il faut ajouter que dans certains cas l’espèce se compose d’êtres parfaitement distincts, procédant par multiplication les uns des autres. À l’idée de continuité d’individus, qui se trouvait au fond de toutes les définitions données, il faut joindre l’idée de succession de cycles. C’est là ce que Chamisso a le premier parfaitement compris, ce que Steenstrup n’a fait que répéter après lui.

Sous sa forme de métamorphose proprement dite et de généagénèse, le phénomène général qui nous occupe a paru longtemps fournir des armes aux partisans de la génération spontanée. Jusqu’à Redi et à Vallisnieri, les larves d’insectes étaient regardées comme formées par l’action des forces physico-chimiques sur la matière organique en décomposition. Dans quelques ouvrages, même des plus modernes, les intestinaux sont cités comme des produits immédiats de l’organisme qui les renferme. Nous avons vu que les faits, mieux connus, conduisent à une conclusion diamétralement opposée. On