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ce qui prit le nom de la flottille de Boulogne, et qui était en réalité la flotte la plus nombreuse qu’on eût vue jusque-là, car elle se composait de douze à treize cents chaloupes, bateaux et péniches, tous portant du canon, et d’un millier de navires de transport, achetés au cabotage ou à la grande pèche.

De là une charge relativement bien lourde pour les finances. Le budget des dépenses de l’an xi (de septembre 1802 à septembre 1803), estimé d’abord à 500 millions, fut porté à 590, et fut effectivement de 632. Les recettes ordinaires ne furent que de 571 millions[1]. Les dépenses devaient s’élever à 632 millions ; mais aux recettes ordinaires on sut ajouter des ressources extraordinaires, sans recourir à l’emprunt, si ce n’est bien plus tard et seulement par une méthode indirecte à l’occasion du règlement définitif des budgets des années ix, x et xi. Ce furent d’abord les subsides des états alliés et des cliens de la république française. En fait d’alliés, il n’y avait guère que l’Espagne qui pût porter ce nom. Le premier consul aima mieux son argent que son concours actif, qui n’eût jamais été efficace, non-seulement parce que chez cette généreuse nation tout s’était désorganisé sous la déplorable administration d’un indigne favori, mais encore perce que Godoy penchait en secret pour l’Angleterre et ne demandait pas mieux que de trahir l’alliance. L’Espagne s’engagea à un subside de 6 millions par mois, que le règlement des comptes antérieurs réduisit à quatre, somme qu’encore il lui était plus aisé de promettre que de payer.

Les cliens, c’étaient les états qui avaient été mis au monde par la révolution française, comme la république italienne, et ceux qu’elle avait délivrés de la domination autrichienne pour les entraîner dans son orbite, comme la Ligurie et Parme ; c’était encore la Hollande, qui s’était modelée à notre image. On demanda à la dernière une coopération directe et complète ; elle la donna avec cette honnêteté et cette fidélité qui sont des attributs reconnus du caractère hollandais. La république italienne, qui n’avait pas encore d’armée, quoiqu’elle dût bientôt mettre en ligne des troupes vaillantes, ne pouvait offrir que de l’argent ; elle fournit en conséquence 1 million 600 000 fr. par mois ou 19 200 000 fr. par an ; la république ligurienne donna 1 200 000 fr. par an, et Parme 2 millions. C’était de la part de l’Italie une contribution totale de 22 400 000 fr. À cette

  1. Voyez les Mémoires du duc de Gaëte, t. 1er, p. 304. C’est, d’après la même autorité (t. II, p. 15), que je porte les dépenses à 632 millions (exactement 632 279 523 fr.). Tel en était le montant en l’an xiii, lors de la clôture de l’exercice. On sait qu’à cette époque le montant des recettes ne comprenait pas les frais de perception ; mais en l’an xi une partie des dépenses des départemens, les dépenses fixes, étaient portées au budget de l’état.