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indolens dont le rôle est purement nominal, cela est vrai surtout des conseils administratifs des chemins de fer. On ne peut en douter quand on voit des hommes, et des hommes fort occupés d’ailleurs, faire partie de deux, de trois, de quatre conseils différens, et lorsqu’on recherche les causes qui ont pu amener telle ou telle adjonction. Maintenant qu’on n’a plus besoin, comme à l’origine, de parler aux yeux par l’éclat de certains noms, on devrait entrer dans la voie des réductions. Outre l’économie réalisée, qu’on pourrait faire tourner à l’avantage commun du public et des compagnies en abaissant le prix des transports, en attirant de plus en plus les voyageurs, cette mesure aurait l’avantage de rendre les comités supérieurs plus homogènes, d’y faciliter l’accord des volontés et de prévenir des luttes intestines qui ont quelquefois retenti si fâcheusement au dehors.

Un inconvénient plus regrettable encore doit être signalé dans la formation des conseils d’administration. La rééligibilité indéfinie des membres rend l’élection par l’assemblée générale absolument illusoire. Les conseils sont, en fait, indépendans de l’association même à la tête de laquelle ils sont placés, et dont ils sont chargés de représenter les intérêts. Peu à peu chaque conseil se considère comme ayant une existence à part. Il ne devrait peut-être y avoir de rééligibles que les membres délégués à la gestion de quelque partie du service, et qui ont besoin d’avoir une expérience toujours longue et difficile à acquérir[1].

Toute l’organisation du personnel, surtout du personnel central, pourrait être révisée dans le même sens que celle des comités administratifs. Sur le chemin du Nord, l’administration centrale proprement dite coûte 877,000 fr. Sur le chemin d’Orléans, elle absorbe, en y comprenant le service central des ingénieurs, 884,000 francs, sans compter la quote-part attribuée à chaque agent dans la somme prélevée sur les recettes au profit de tous les employés. Ces divers chiffres sont considérés comme trop élevés par les juges les plus compétens, et je ne cite ces deux compagnies qu’à titre d’exemple; je pourrais multiplier les citations. Ce n’est pas par la réduction des traitemens, sauf pour quelques situations trop favorisées, qu’on devrait procéder, mais par la simplification des rouages, par la suppression de quelques ressorts inutiles, comme il s’en glisse dans

  1. On se demande pourquoi les fonctions de ceux des administrateurs qui ne sont pas délégués à un service spécial ne seraient pas gratuites. Il en est ainsi aux États-Unis, où le conseil d’administration forme en quelque sorte le conseil municipal de chaque ligne. Comme ils sont pris parmi les plus forts actionnaires, c’est-à-dire parmi ceux qui ont le plus d’intérêt à la bonne gestion des affaires de la compagnie, les administrateurs trouvent leur récompense dans la prospérité commune. En fait, il n’y a chez nous de rôle vraiment actif, susceptible de légitimer une rémunération, que celui des administrateurs délégués.