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délibération leur serait possible, elles manqueraient des moyens de s’éclairer. — La bonne administration des chemins de fer cependant touche aujourd’hui de trop près à la fortune publique, j’allais dire à l’ordre public, pour que le gouvernement ne se préoccupe pas de la situation faite aux actionnaires, et sur laquelle on ferme trop aisément les yeux tant que les dividendes sont élevés. Or ne peut-on rien pour remédier à l’insuffisance des statuts existans? ne peut-on rien aussi pour faire disparaître de l’organisation des sociétés exploitantes un vice dont les effets se sont plus d’une fois manifestés? Ce vice tient à l’absence d’une responsabilité sérieuse remontant assez haut. Les chefs supérieurs des compagnies, les conseils et comités d’où émane l’impulsion, et dont les membres reçoivent un traitement sous une forme ou sous une autre, sont véritablement irresponsables. Les tribunaux prononcent-ils des amendes, ces peines ne grèvent que la masse des actionnaires. Sans doute, à défaut de responsabilité réelle, il existe une responsabilité morale que sentent vivement des hommes tels que ceux dont les conseils d’administration sont composés; mais on ne peut pas asseoir un système sur des sentimens individuels. La responsabilité est donc à constituer. Il faudrait pour cela que dans le cas de graves manquemens, surtout de ceux qui compromettent la vie des voyageurs, la peine ne portât pas seulement sur les agens subalternes qui ont violé la règle, mais qu’elle pût atteindre les chefs chargés d’en prévenir la violation. Il ne suffit pas d’avoir donné une consigne pour dégager sa responsabilité, il est nécessaire que des mesures suffisantes aient été prises pour assurer l’entière exécution de cette consigne. C’est la vigilance et la fermeté des chefs qui peuvent seules imprimer une allure régulière à tous les services.

Des modifications d’un autre genre, des modifications effectuées dans le régime intérieur des compagnies et par elles-mêmes, pourraient fortifier encore leur état financier et améliorer certaines parties du service. Toute réforme qui prévient une déperdition de forces intéresse d’ailleurs le public en ce sens qu’elle ménage des ressources pour les innovations utiles. Il n’est pas douteux, par exemple, que l’administration centrale des compagnies ne soit installée sur un pied trop magnifique. Les conseils d’administration sont généralement trop nombreux. L’inégalité qu’on remarque sous ce rapport atteste à quel point cette composition est arbitraire. Tel conseil est composé de seize membres, tandis que tel autre en renferme jusqu’à vingt-quatre. Les fusions opérées entre les compagnies, qui obligeaient à fondre plusieurs comités en un seul, ont contribué à amener cet état de choses. S’il est vrai de dire d’une manière générale qu’il n’y a point de conseils où il ne se trouve des membres