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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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31 juillet 1856

Au moment où la guerre d’Orient venait de commencer, il y a deux ans, l’Espagne était emportée dans un de ces tourbillons révolutionnaires qui se sont élevés si souvent au-delà des Pyrénées depuis un demi-siècle. La guerre entre les premières puissances de l’Europe a eu le temps d’arriver à son terme, la paix a pu être rétablie et redevenir la règle de toutes les relations, avant que l’Espagne parvînt à son tour à se raffermir, à se reconstituer et à rentrer dans la voie d’un ordre régulier. Cela n’a rien de surprenant peut-être : une guerre peut trouver une fin prompte et opportune quand elle a un objet précis, quand elle est soutenue avec des forces obéissantes et fidèles, au nom de gouvernemens maîtres de leur politique. Il n’en est point de même d’une révolution qui échappe à tous les calculs comme à toutes les directions, et qui trouve d’autant plus d’alimens, que les malaises, les passions et les antagonismes sont plus vivaces et plus invétérés au sein d’un pays. Bien loin d’arriver à se replacer par degrés sous l’empire de lois efficaces, l’Espagne a vu successivement toutes ses institutions ébranlées, sa paix intérieure périodiquement troublée, des partis acharnés à se disputer le pouvoir, des excès sans répression et toujours renaissans, jusqu’au moment où quelques-uns des hommes qui avaient contribué aux événemens de 1854 ont senti le besoin de faire un effort vigoureux pour raffermir cette société chancelante. Qu’on n’oublie point, en effet, que depuis deux ans il y a eu en quelque sorte deux révolutions en présence à Madrid : l’une datant du 28 juin 1854, modérée dans ses vues et personnifiée dans le général O’Donnell ; l’autre portant la date du 18 juillet, représentée par Espartero, et rattachant à sa cause les partis les plus ardens, qui auraient voulu la pousser beaucoup plus loin. Il est venu un moment où la lutte s’est engagée, et jusqu’ici c’est la révolution du 18 juillet 1854 qui paraît vaincue. En réalité, c’est là le secret de la crise qui vient d’éclater au-delà des Pyrénées et des événe-