Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 4.djvu/545

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans les transactions monétaires du pays, on reconnaît combien il importe que les hommes chargés et responsables de la conduite de ses affaires traitent avec un extrême ménagement les intérêts privés, d’abord parce que la justice l’exige, ensuite parce que la cause des réformes et des améliorations progressives aura grandement à souffrir, si vous ne savez pas les concilier avec les égards dus à la sécurité et au bonheur des personnes. »

Sir Robert s’exagérait, dans cette occasion, les difficultés de son entreprise ; les inconvéniens d’une incomplète ou défectueuse constitution des banques et de l’absence de garanties bien combinées, soit pour l’émission et le paiement de leurs billets, soit pour leurs rapports avec l’état et le public, avaient depuis quelques années fortement frappé les esprits ; la lutte violente suscitée dans les États-Unis d’Amérique à l’occasion de la banque centrale de l’Union, les désordres qui avaient éclaté, après sa suppression, dans une multitude de banques locales, les souffrances publiques et individuelles qui en étaient résultées, tous ces faits avaient appelé les méditations des financiers et jeté un grand jour sur toutes les parties de la question. Les principes fondamentaux d’un bon système monétaire étaient généralement compris et acceptés. Vraies en théorie et utiles en pratique, les propositions de sir Robert Peel pour compléter ou réformer à certains égards l’organisation de la banque d’Angleterre ne rencontrèrent d’objections que dans quelques intérêts personnels qu’elles dérangeaient et dans quelques esprits entêtés ou chimériques dont elles contrariaient les routines ou ne satisfaisaient pas les rêves. Les chefs whigs les appuyèrent hautement. Dans la chambre des communes, les amendemens dont elles furent l’objet réunirent à grand’peine dix-huit suffrages. La chambre des lords les adopta, presque sans discussion, et sir Robert eut la satisfaction d’accomplir en 1844, dans le régime monétaire de son pays, l’œuvre qu’il avait commencée en 1819, contre l’opinion de son père et ses premiers votes à lui-même, peu après son entrée dans le parlement. Il jouit vivement de ce succès, et se complaisait à parler de son bill sur la banque comme de l’un des actes les plus considérables de sa vie publique. Peut-être parce que c’était l’un de ceux où il croyait avoir le mieux réussi à atteindre le but qui préoccupait constamment sa pensée, l’accord de la vérité scientifique et de l’efficacité pratique.

Dans la seconde des questions qu’il éleva lui-même quand il aurait pu s’en dispenser, il fut bien loin de rencontrer la même unanimité ; elle devint au contraire, entre lui et son parti, l’occasion d’une lutte ardente et le premier éclat de la scission. S’il se fût borné à demander, pour le collège catholique de Maynooth, les