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semble loin de s’améliorer. Le cabinet du roi Ferdinand n’en est pas sans doute à répondre aux diverses notes qui lui ont été transmises. Quel paraît être au fond le sens de cet échange de communications diplomatiques ? Les cabinets de l’Occident disent naturellement au roi de Naples qu’une politique à outrance ne peut avoir d’autre résultat que de préparer d’inévitables explosions là où une politique mesurée et conciliante tempérerait les haines et désarmerait les passions, que des améliorations justes et un bon gouvernement seraient plus efficaces que des rigueurs, et que la situation de ses états, en étant un péril permanent pour lui-même, crée aussi un péril pour l’ordre en Europe. Le roi de Naples répond à son tour que c’est l’intervention de la diplomatie qui crée ce péril en rallumant des passions prêtes à s’apaiser, et peut-être n’est-il pas éloigné de penser que c’est le congrès de Paris qui a été le véritable perturbateur en soulevant cette terrible question italienne.

On voit que ce dialogue diplomatique peut se continuer indéfiniment dans ces termes. Malheureusement les faits les plus récens sont loin de présenter la situation du royaume des Deux-Siciles sous un jour très favorable, si on s’arrête aux détails de ce procès jugé en ce moment par la cour criminelle de Naples. C’est encore une triste affaire politique, une affaire de conspiration et de complots révolutionnaires. Parmi les accusés, il y a des prêtres, des avocats, des propriétaires, d’anciens condamnés, une femme vivant dans un couvent. Quel lien a pu rapprocher ces acteurs divers d’un drame assez mystérieux ? On ne le sait trop. Chose plus grave, dans le cours de ce procès, les détails les plus tristes ont été dévoilés, dit-on. Un prêtre aurait révélé qu’il avait été conduit par les plus mauvais traitemens et par les menaces à compromettre un autre prêtre, son co-accusé. Cette pénible affaire a été subitement interrompue il y a quelques jours. Qu’on admette, si l’on veut, que dans les versions répandues en Europe il y a la part de l’exagération : il reste toujours au fond un fait vrai sur lequel le gouvernement napolitain peut se reprocher à lui-même de ne point jeter la lumière ; qu’on observe en outre la singulière opportunité d’un procès de ce genre venant à l’heure où les puissances européennes interviennent pour demander un adoucissement de politique. Il est donc vrai que rien ne paraît de nature aujourd’hui à diminuer l’utilité des conseils de la France et de l’Angleterre ; mais ici encore il n’y a point à se méprendre. Lorsqu’en présence des conditions dans lesquelles vivent certains états italiens, et le royaume de Naples en particulier, on fait un reproche aux cabinets occidentaux de ne point agir avec une autorité plus décisive, de ne point imposer de ré formes, on ne remarque pas que c’est la l’entreprise la plus délicate et la plus périlleuse, et que c’eût été un étrange spectacle à offrir à l’Europe de porter la main sur la dignité de souverains italiens au moment où on venait de faire la guerre pour l’indépendance de la Turquie, dont les provinces ne passent pas cependant pour être des mieux administrées. L’action de la France et de l’Angleterre ne peut s’exercer que dans la mesure compatible avec la dignité des gouvernemens. Si cette politique est déclarée impuissante, c’est que sans doute il y a une politique plus sûre. M. Manin, le conseiller de l’Italie, propose aux sujets du roi de Naples de refuser l’impôt en