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toutes les marines et faire appel à la bonne volonté des individus. Des associations de météréographes ont été fondées ; il s’est trouvé des savans illustres pour les diriger, des personnages opulens pour les doter, et un nombre considérable d’observateurs bénévoles se sont dévoués à étudier jour par jour, heure par heure, les instrumens indicateurs de l’état atmosphérique. De l’Angleterre, la fièvre des investigations s’est répandue sur l’Europe, passant par la Belgique, où elle a trouvé un directeur savant et zélé ; elle s’est étendue sur l’Allemagne ; elle a pénétré en Russie, où elle s’est ménagé l’appui du gouvernement. Un immense réseau d’observatoires couvre aujourd’hui toute l’étendue de l’empire russe, et une armée de météréographes, ayant son général, ses officiers et ses soldats, remplit avec une régularité militaire des registres préparés à l’avance avec des colonnes en blanc où il n’y a qu’à inscrire les indications don nées par les appareils aux divers momens de la journée.

Au milieu de cette préoccupation générale, quelques personnes ont porté leur attention sur les appareils explorateurs pour les modifier et les bien installer. On a imaginé des thermomètres armés d’un crayon qui tracent eux-mêmes la température sur le cadran d’une horloge, au lieu même qui marque l’heure ; des appareils de photographie font pour ainsi dire le portrait des baromètres ou des boussoles, dont ils fixent à chaque instant l’indication sur une plaque daguerrienne. On n’a plus qu’à les mettre en fonction, à les remonter comme une horloge, et ils remplacent plus exactement et sans dis traction l’observateur, à qui il fallait nécessairement pardonner quelquefois des irrégularités. Ces instrumens à indication continue ne furent pas un petit progrès, au dire surtout de ceux dont ils simplifient le travail. Rien ne manqua plus dès-lors à la météorologie, ni les instrumens précieux, ni les dévouemens individuels, ni les patronages, ni les budgets, ni l’organisation.

Je me trompe, il lui a manqué la France, qui jusqu’à présent ne s’est pas mise au niveau des pays qui l’entourent. Les grandes fortunes trouvent chez nous à s’employer autrement, et les individus songent médiocrement aux sciences ; peut-être n’ayons-nous pas dans le caractère une assez forte dose de cette placidité inerte, de ce dévouement sans passion, qui font trouver du charme dans un commerce intime avec le baromètre. Nos savans d’ailleurs n’ont pas montré une grande émotion à l’endroit de la météorologie ; ceux qui auraient pu faire naître, développer et diriger le mouvement se sont tenus à l’écart ; personne n’a donné l’exemple en exécutant avec continuité des études régulières. L’observatoire de Paris lui-même n’a pas subi l’influence générale, il n’a montré ni entraînement ni mauvais vouloir ; il s’est contenté de continuer ses habitudes traditionnelles