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à cet égard, car le même personnage, lors de sa première visite à la Malmaison, s’était empressé de lui faire remarquer qu’il était rare que le premier consul donnât des audiences aussi longues, et tout en voulant bien le louer, avec une apparente effusion, de la bonne direction qu’il avait imprimée à l’administration de la caisse, il avait ajouté qu’il n’était pas juste que tout le poids du travail retombât sur lui, et que, l’institution devant acquérir un surcroît d’importance et d’activité, il convenait que le gouvernement lui donnât le secours de nouveaux administrateurs qui partageraient le labeur avec lui. En conséquence de ces charitables sentimens, le projet de décret augmentait le nombre des administrateurs, et établissait entre eux une distribution du travail. Ils devaient former un conseil dont les membres auraient des pouvoirs égaux. Dans la nouvelle entrevue de la Malmaison, le premier consul donna le projet à lire à M. Mollien, toujours en présence du second et du troisième consul, et lui demanda s’il avait été consulté et s’il n’avait rien à y objecter. Avec sa discrétion accoutumée, M. Mollien répondit qu’il ne connaissait ce plan que par la lecture qu’il en prenait au moment même, mais qu’il n’y faisait aucune objection. Avec ce mélange de laisser-aller et d’élévation qu’il montrait souvent, le premier consul répliqua : « Vous ne demanderiez pas mieux que d’en faire, je sais bien que vous n’admettez pas cette diversité d’attributions dans une caisse d’amortissement ; mais quand chaque branche n’est pas assez forte, il faut réunir toutes les branches pour en faire un faisceau. Nous ne pouvons pas prétendre à improviser une machine d’amortissement comme celle de l’Angleterre. » Et il ajouta : « Ce que je désapprouve dans ce plan, c’est le partage des fonctions entre les administrateurs avec égalité de pouvoir ; il faut sortir de cette ornière de républicanisme, il faut que l’administration agisse au lieu de délibérer. C’est parce que la caisse d’amortissement doit avoir des attributions qui semblent étrangères entre elles, c’est parce qu’elle doit remplir des devoirs différens, qu’il faut, pour y maintenir l’ensemble, une autorité centrale qui puisse rallier tout, surveiller tout, répondre de tout. La caisse d’amortissement a besoin d’un chef ; c’est une importante fonction que sa direction. Ce chef aura près de lui des administrateurs, quatre par exemple, mais c’est lui qui doit les diriger ; il doit avoir seul le secret des opérations, recevoir seul les communications du ministre des finances et les miennes, lorsque je l’appellerai. Il peut dans beaucoup de cas faciliter les opérations de trésorerie, épargner, dans ce qu’on nomme les négociations du trésor, des difficultés et des pertes telles que celles dont j’ai déjà eu plusieurs fois à me plaindre… »

Il n’est pas besoin de dire que le chef donné à la caisse d’amortissement,