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l’individu est en état de comprendre la portée de ses actes et d’en supporter la responsabilité infiniment mieux que dans les sociétés antiques.

L’économie politique enseigne le respect de la propriété comme une des consécrations les plus indispensables de la liberté personnelle, ou, pour mieux dire, elle ne sépare pas l’une de l’autre. À ses yeux, toutes les formes de la propriété, du moment qu’elles sont acquises légitimement, sont également dignes de la protection des lois et du respect des hommes. En cela, elle est plus large et plus avancée que la doctrine, jadis dominante et aujourd’hui encore fort accréditée près d’un bon nombre d’esprits, que la propriété territoriale occupe un rang à part, qu’elle est celle dont la possession est noble par exemple, tandis que l’exploitation de la richesse mobilière par les voies du commerce ou des arts industriels serait quelque chose de vil ou tout au moins de subalterne. L’économie politique range dans la propriété tout ce que l’intelligence et la prévoyance humaine parviennent à créer et à s’approprier pour notre usage ; elle assimile même les facultés intellectuelles à la propriété, et considère les connaissances acquises ainsi que l’expérience comme un capital. Par ces manières de voir sur la propriété, l’économie politique indique à la, législation des perfectionnemens qu’elle doit rechercher, car on a dit avec raison qu’on pouvait mesurer la civilisation d’un peuple au soin que les lois et les mœurs apportent à garantir la propriété, sans faire de différence entre les modes divers sous lesquels elle se présente.

L’économie politique repousse les monopoles commerciaux et les privilèges industriels par les mêmes motifs qui, aux yeux de la politique moderne, recommandent le principe de l’égalité devant la loi. De même que la politique condamne les immunités que s’attribuaient les ordres privilégiés, les tributs qu’ils se faisaient servir par la masse des citoyens composant le tiers-état, et qu’elle en flétrirait le renouvellement comme une monstruosité ; de même que, suivant les principes du droit public moderne, toute redevance à la charge des contribuables, qui serait établie au profit d’un particulier ou de plusieurs, sans qu’elle fût justifiée par un service équivalent, ne saurait, de quelques dehors qu’on la veuille affubler, être considérée que comme une de ces deux choses : une exaction incompatible avec l’es prit du temps, ou une charité publique dans le genre de la taxe des pauvres, — de même une politique commerciale qui, par le moyen de la prohibition douanière ou de droits de douane élevés, aurait cet effet que des manufacturiers ou d’autres producteurs obligeassent le public à leur payer, pendant une durée indéfinie, leurs produits plus cher qu’ils ne valent sur le marché général du monde, serait radicalement inconciliable avec les droits des citoyens.

Au point de vue de l’économie politique, l’état, lorsqu’il lève des