Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 4.djvu/226

Cette page a été validée par deux contributeurs.

couru récemment la Grèce pour reconnaître par lui-même la situation du pays, et qui a délivré au retour une attestation de la parfaite sécurité avec laquelle il a visité les provinces. M. Smith O’Brien, voulant même faire l’expérience complète, avait tenu à n’être suivi d’aucune escorte. Seulement, s’il y avait quelque vérité dans une divulgation indiscrète, le ministre de l’intérieur, voulant de son côté épargner au voyageur anglais les mauvaises rencontres et les mauvaises impressions, aurait donné l’ordre à tous les préfets de faire bien garder les endroits dangereux à l’insu de ce bienveillant touriste, de telle sorte que le témoignage de M. Smith O’Brien serait aussi naïf que peu concluant, comme les événemens viennent de le démontrer. Au surplus, il est si difficile de se trouver en face de la vérité, que le gouvernement grec lui-même est réduit à se défendre contre les plus singuliers et les plus coupables subterfuges. C’est ainsi que récemment le ministre de l’intérieur avait à démentir une circulaire qui avait été adressée en son nom aux nomarques du royaume, et où on lui faisait tenir le plus étrange langage sur les puissances occidentales et sur les chefs des troupes d’occupation. Que conclure de ces faits, si ce n’est que la désorganisation est dans le pays, et qu’elle n’est point étrangère à l’administration elle-même ? La réalité de la situation de la Grèce, c’est la possibilité d’actes audacieux de brigandage accomplis aux portes d’Athènes, c’est l’insaisissable puissance de ces malfaiteurs, qui semblent jusqu’ici assurés de l’impunité dans le royaume hellénique. Le roi Othon voyage en ce moment dans l’Occident. Nulle part à coup sûr il ne rencontrera une pensée hostile contre son trône et moins encore contre son pays ; mais partout il trouvera, sans nul doute, une juste préoccupation de ces désordres, un désir fort naturel de voir cesser une situation qui paralyse la Grèce en la déconsidérant aux yeux de l’Europe. Lorsque le congrès de Paris terminait ses travaux il y a quelque temps, la Grèce fut un des pays dont l’état critique appela le plus vivement l’attention des plénipotentiaires. La France et l’Angleterre n’étaient pas mues seulement par un sentiment général et vague d’intérêt : elles exerçaient un droit comme cours protectrices. Malheureusement les circonstances n’ont point changé, et les mêmes raisons de s’occuper du royaume hellénique existent encore, il est évident qu’un pays ou des bandes de brigands peuvent exercer leur honnête industrie jusque sous l’œil du gouvernement, jusqu’aux portes d’une ville où ils ont peut-être des complices secrets, il est évident que ce pays n’est point dans des conditions normales, et il est à craindre que le besoin de se faire illusion et de faire illusion à l’Europe ne soit un des caractères de cette maladie, dont la Grèce ne se relève pas, parce qu’elle ne s’en rend pas compte. Il est bien clair que les institutions qui existent à Athènes n’ont point une efficacité sérieuse, que les finances grecques restent ce qu’elles ont été jusqu’ici, que le développement du royaume hellénique n’est nullement en rapport avec ce qu’on pourrait attendre ; mais au moins devrait-on songer à garantir ce premier bienfait, qui est la sécurité matérielle.

Charles de MAZADE.


Lorsque récemment nous rendions hommage au mérite et aux travaux de sir William Hamilton, nous étions loin de penser qu’il allait être enlevé si