opérer cette ascension : elle brise souvent des vases dont la résistance est bien supérieure au poids des colonnes d’eau qui atteindraient la profondeur où la terre est brûlante.
Je n’ai point trouvé dans l’ouvrage si complet de M. Constantin James la mention de certaines eaux minérales qui viennent sourdre à la côte, au bassin d’Arcachon, près de La Teste, et qui sont devenues légèrement sapides en passant sur des débris de sapins fossiles. Les anciens, qui mettaient des pommes de pin dans leur vin au moment de la fermentation, auraient trouvé sans doute ces eaux minérales de leur goût, et tout le monde sait qu’une grande partie de la qualité des eaux-de-vie de Cognac est due à la substance résineuse qu’elles empruntent aux futailles qui les contiennent. Dans plusieurs cas, au reste, je pense que des eaux minérales artificielles, chargées d’électuaires à la dose convenable, seraient très salubres, et surtout dans les pays chauds.
La conclusion de ces remarques, c’est qu’on doit considérer le livre de M. Constantin James comme une mise en communauté de toutes les notions médicales que l’auteur a recueillies sur l’action des eaux minérales de toute sorte, et qu’il n’a point voulu se réserver en propriété exclusive, puisque son livre est adressé aux médecins comme aux malades. J’ai entendu citer l’envie comme une passion de première qualité chez les médecins, invidia medici, comme on citerait une peste d’Égypte ou une fièvre jaune des Florides. L’auteur du Guide aux eaux minérales parait au-dessus de semblables préoccupations. Il fait part sans réserve de tout ce qu’il sait à ses confrères. La santé a été justement définie un bien dont on ne connaît la valeur que quand on ne le possède plus : nous croyons que tous les hommes prévoyans accueilleront avec plaisir des travaux qui ont pour but la conservation tout autant que le rétablissement de la santé, puisque c’est en même temps comme préservatif, ou techniquement comme prophylactique, que l’action des eaux s’exerce utilement. Quant aux attentions qu’on devrait avoir et qu’on n’a guère pour la conservation de la santé, que l’on me permette de citer ce trait d’un de mes amis qui l’an dernier échappa à la mort au moyen d’un voyage aux eaux d’Allemagne. C’est un optimiste quand même. Il verrait crouler le système du monde, qu’il crierait : Bravo ! Je le félicitais d’avoir échappé à une mort presque certaine, et je lui conseillais d’oublier ce malheur heureusement évité, il me répondit : « Que parlez-vous de malheur et d’oubli ? Je suis au contraire enchanté d’avoir été dangereusement malade. Tous les matins je me félicite de me voir bien portant, et je connais maintenant tout le prix de la santé. » C’était vraiment très philosophique, mais il joignait à sa philosophie les conseils d’un excellent médecin, ce qui était très prudent. De même que les meilleures lois sont celles qui préviennent le crime et non celles qui le punissent, de même le meilleur régime est celui qui préserve de la maladie, et non pas celui qui en opère tardivement la guérison. Avis au lecteur !
BABINET, de l’Institut.