Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 4.djvu/152

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ce centre politique qui fait défaut au pays ; elle sera un point de ralliement pour bien des esprits divisés qui aspirent à une action commune. Son rôle est de surveiller les gouvernemens, de les éclairer par une discussion sage, par des conseils désintéressés, de donner un organe aux sentimens légitimes des peuples, et de neutraliser ainsi les tentatives secrètes de la démagogie. Pour arriver à ce résultat, il ne faut pas de compromis qui affaiblissent l’autorité du publiciste ; il ne faut pas non pas qu’on puisse croire que des liens trop étroits enchaînent le journal à telle ou telle puissance. L’impartialité est ici le premier des devoirs. Est-ce une bonne inspiration, par exemple, de vouloir approuver indistinctement tous les actes de l’Autriche dans sa politique extérieure ? Est-il prudent d’insister sur les affaires d’Italie et de jeter des défis au Piémont ? La situation que nous venons de décrire prouve qu’il y a, sans sortir de l’Allemagne, des questions plus utiles à traiter. La Gazette d’Augsbourg a l’ambition de donner chaque matin un tableau résumé du monde entier ; elle aura beau faire, ses correspondances extérieures, sauf de rares exceptions, seront toujours la partie la plus contestable de sa rédaction. Qu’elle s’attache donc, avant tout, à l’action qu’elle doit exercer sur l’Allemagne elle-même ; qu’elle s’efforce de concilier les gouvernemens et les peuples, qu’elle propage l’esprit moderne, l’esprit de modération et de liberté ! C’est ainsi que les publicistes d’Augsbourg accompliront d’une manière efficace le noble programme qu’ils ont adopté, et qu’ils prépareront par un enseignement sans fracas les transformations nécessaires de la patrie.

Que conclure de tout ce tableau ? J’ai essayé de peindre l’Allemagne en face du traité de Paris, car c’est le dénoûment de la guerre, c’est le traité du 30 mars qui a éclairé la situation de ce pays, qui a mieux fait comprendre le fort et le faible de chacun des états germaniques. Or un fait principal a frappé nos regards. De 1848 à 1856, les progrès du parti féodal, les hésitations, les divergences trop visibles dans la politique extérieure des états germaniques, avaient tristement accusé l’action persistante de l’influence russe au-delà du Rhin. Aujourd’hui cette action fait place à un mouvement d’opinion