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des municipalités nouvelles, l’organisation d’un établissement central investi d’une indépendance suffisante, et chargé, comme cour suprême des comptes, de contrôler l’administration financière, de surveiller la dette publique. Les cinq puissances émettaient l’avis que les réformes proposées par elles devaient prendre un caractère organique et solennel qui les mit à l’abri de toute abrogation. C’était tout un programme de gouvernement, on appelait même cela une ère nouvelle selon un mot du cardinal Bernetti. Malheureusement ces principes, dont l’application eût été si utile, ne purent entrer dans l’esprit craintif du pontife, prêtre fervent, mais prince faible, — et lorsque Grégoire XVI mourut, l’administration romaine était encore ce qu’elle a été pendant longtemps, un mélange d’abus et de désordres difficile à décrire.

Qu’on se représente en effet une administration fort compliquée, où les anciens usages étaient fidèlement conservés, où toute modification, toute amélioration, fût-elle matérielle, était vue d’assez mauvais œil et semblait grosse de dangers. Les affaires étaient exclusivement réservées aux prélats, les emplois supérieurs de l’état étaient de droit interdits aux laïques. Les différens pouvoirs étaient souvent confondus. Le principe de l’infaillibilité pontificale était appliqué aux questions administratives, et on avait vu la décision personnelle du souverain réformer des sentences de tribunaux, même en matière civile ; Il n’y avait point de conseil des ministres, tous les pouvoirs étaient par le fait dans la main du cardinal secrétaire d’état. Le secret le plus absolu couvrait toutes les opérations financières. Il a même été reconnu plus tard qu’il n’y avait point réellement de budget, qu’on oubliait de dresser et de clore les comptes. Les libertés municipales, plus que toutes les autres chères aux populations italiennes, avaient subi des restrictions singulières. En un mot, on vivait, ainsi que nous le disions, d’une ancienne impulsion, au milieu d’un arbitraire auquel tout le monde participait, les gouvernans et les gouvernés eux-mêmes. C’est à cette situation pleine de troubles et de dangers que le mémorandum de 1831 proposait de remédier. Seulement, quand on parle aujourd’hui des États-Romains, il ne faut point oublier que la situation n’est plus la même. Elle révèle encore sans doute la nécessité de grandes améliorations, et c’est ici surtout que l’intervention des puissances peut être utile ; mais elle s’est aussi notablement modifiée sous le règne de Pie IX. Les principes proclamés par l’Europe en 1831 ont été en réalité le programme du nouveau pape à son avènement. Ils ont disparu un instant dans la tour mente révolutionnaire, mais ils sont redevenus à beaucoup d’égards, on peut le dire, la règle de conduite du pape au retour de Gaëte. Ils