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gronder le tonnerre sur la côte flamande, abaissez la morgue et bridez les convoitises de l’ennemi. Faites que la flotte marchande puisse voguer sur les flots, et que la mer abondante puisse répandre ses dons sur le pays ! »

Joost Vondel, comme Jacob Cats, a célébré l’océan. Il n’y a pas vu seulement une glorieuse arène où les Pays-Bas avaient à lutter pour la liberté politique et religieuse ; il a salué dans la navigation l’énergique instrument du commerce, ce lien international des peuples modernes. « Le prince des vents, dit Vondel, pour resserrer le genre humain par des nœuds d’amour, donna à chaque pays de la terre des produits particulière. Aucune nation n’aurait été détruite par la guerre, si chacun comprenait que, pour satisfaire à ses besoins, il ne peut se passer de son voisin et qu’une province est utile à l’autre. Tel chaque membre, même le plus mince, sert aux besoins du corps entier. Pour peu qu’on donne un but moral à cet art d’assembler les chênes puissans et de les lancer sur la mer, les dons du ciel afflueront sur la navigation. Ils seront comme l’huile embaumant la barbe du grand-prêtre. »

Le caractère populaire, les mœurs, la littérature, reflètent en Hollande cet ensemble de faits qui se rattachent à l’océan. Les premières chansons que l’enfant hollandais entend fredonner à ses oreilles sont comme un écho de la vie maritime. Les jeux, les exercices, les divertissemens de la jeunesse se lient également à la Mer du Nord. Une des plus touchantes ballades de la poésie hollandaise a été inspirée à l’auteur, Jacobus Bellamy, par les sables mouvans qui entourent sous l’eau les côtes de la Zélande. « — Une jeune fille, une fille bien-aimée, née d’une mère qui était morte en lui donnant le jour, avait grandi sous les larmes et les baisers de son père. Elle parlait avec une naïveté attendrissante de sa mère qu’elle n’avait pas connue ; elle était l’admiration de chacun par sa figure, son adresse et sa vertu. Elle était belle comme la lune qui brille sur les dunes. On voyait son nom écrit çà et là sur le sable par les jeunes gens de la Zélande. À peine une jolie fleur s’ouvrait-elle que cette fleur était cueillie pour Roosje. — En Zélande, lorsque viennent les vents d’ouest, avant-coureurs de l’été, vient aussi un poisson délicat qui se cache dans le sable, et que les jeunes gens déterrent comme un objet de friandise. C’est le temps des amusemens et de la gaieté. On s’avance loin, bien loin sur la côte plate dans la mer. Souvent les jeunes garçons entraînent les jeunes filles qui sont sur le bord, et Roosje fut ainsi entraînée dans les vagues malgré sa résistance. — Un baiser, un baiser ! ou vous irez encore plus loin, dit celui qui l’entraînait. Elle se prit à fuir ; il la poursuivit, tous deux riant. — A la mer ! à la mer ! crièrent à leur tour les camarades. Il la pousse devant lui. C’est de