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LA RESTAURATION
DES STUARTS

Histoire du Protectorat de Richard Cromwell et du Rétablissement des Stuarts, par M. Guizot.[1]


Le 3 septembre 1658, Cromwell mourait à Whitehall, et son souverain pouvoir tout entier passait en quelques heures dans les mains de son fils, comme un légitime héritage, aux acclamations du peuple et de l’armée. Jamais prince de Galles n’avait plus aisément succédé à un roi d’Angleterre. Tous les partis nés de la révolution, oubliant leurs querelles, se groupaient pour le soutenir ; les royalistes courbaient la tête, sans joie et sans espoir, résignés à force d’impuissance.

Vingt mois et vingt-six jours après ce facile début du nouveau protecteur, le 29 mai 1660, Charles II entrait à Whitehall et prenait possession du trône de ses pères, à la clarté de mille feux de joie, au bruit d’applaudissemens enthousiastes, sans qu’un murmure se fît entendre, sans qu’il en eût coûté une goutte de sang.

Vit-on jamais plus étonnant contraste ? L’histoire nous montre à tous les âges de brusques révolutions, de foudroyantes catastrophes qui dans l’espace d’un jour changent la face des états ; mais où trouver une restauration s’accomplissant ainsi d’elle-même ? où trouver, sur un sol fumant encore du sang royal, une monarchie rétablie sans combat, sans efforts, sans autre appui visible que les vœux de ses partisans et l’affaissement de ses ennemis ?

  1. 2 volumes in-8o, 1856, librairie Didier.