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unes sont à courte échéance (le minimum d’échéance ne peut être pour celles-là, d’après les articles 7 et 8 des statuts, de moins de quarante-cinq jours, et le maximum ne doit pas atteindre un an), les autres à échéance éloignée et remboursables par voie d’amortissement. Les unes et les autres sont également impropres à prendre le caractère et le rôle de monnaie fiduciaire, c’est-à-dire de mesure commune des valeurs, car n’étant ni les unes ni les autres remboursables à présentation, elles sont incapables de prendre et de garder cette fixité, cette invariabilité, qui sont le caractère du titre monétaire, et lui permettent de servir de mesure commune aux valeurs. Sous ce rapport, les obligations à courte échéance du Crédit mobilier n’atteignent pas plus le but qu’on leur assigne, faire fonction de monnaie, que les obligations à échéances éloignées. Dire qu’elles offrent toute garantie de remboursement à l’échéance qu’elles portent, parce qu’elles correspondent aux placemens temporaires de la société, est une déclaration inutile et étrangère à la question, car il ne viendra jamais à la pensée de personne de supposer que le Crédit mobilier ne prendra point les précautions voulues pour faire honneur à sa signature, mais l’exactitude de ses paiemens ne changera rien à la nature de ses obligations à courte échéance : elles ne seront point remboursables à vue. Parler de l’intérêt qui y est attaché, comme leur donnant une aptitude à remplir le rôle de monnaie fiduciaire, serait un non-sens. Cet intérêt ne distingue point l’obligation à courte échéance du Crédit mobilier de la classe des valeurs payables à échéance déterminée. Toutes ces valeurs, effets de commerce, bons du trésor, etc., sont productives d’intérêt pour ceux qui prêtent sur elles des espèces : seulement cet intérêt est prélevé d’avance et par déduction sur la somme représentée par l’effet. Celui qui reçoit l’effet donne en échange cette somme en numéraire moins l’intérêt qu’elle doit produire depuis le moment où se fait l’escompte jusqu’au jour de l’échéance : c’est ce que l’on appelle en termes techniques prendre l’escompte en dedans. La seule différence qu’il y aura entre les effets de commerce et les obligations du Crédit mobilier, c’est que pour les premiers l’intérêt qui rémunère la prestation de l’argent se prend en dedans, est déduit de la somme, et que pour les secondes il se prendra en dehors, c’est-à-dire s’ajoutera chaque jour à la somme, jusqu’à l’époque du remboursement ; ce n’est qu’une différence de forme. Encore cette différence de forme ne pourra-t-elle subsister dans la pratique. En effet, pour que l’obligation du Crédit mobilier conservât le pair et ne fût jamais soumise aux déductions de l’escompte, il faudrait que le taux de l’intérêt dans le commerce fût fixé invariablement, et que l’obligation produisît précisément cet intérêt invariable. Or on