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entre l’escompte et la commandite, entre le crédit commercial et le crédit commanditaire. Ainsi que nous l’avons vu, en étudiant les diverses formes de crédit[1], la commandite, comme l’escompte, n’est qu’une opération intermédiaire par laquelle les capitaux disponibles sont transmis aux intérêts qui réclament le crédit ; mais la se borne la ressemblance. Les capitaux sur lesquels agissent ces deux systèmes de banque différant de nature, les opérations de crédit dans lesquelles ils s’emploient diffèrent de même. Tandis que l’escompte rend leur disponibilité aux fonds de roulement engagés dans les opérations commerciales, la commandite immobilise dans l’industrie les capitaux disponibles qui cherchent des placemens fixes. Il n’est donc point exact de dire, sans restriction et sans explication, qu’une banque de commandité, comme le Crédit mobilier, joue, à l’égard des valeurs représentant le capital de l’industrie, un rôle analogue aux fonctions que remplissent les banques d’escompte pour les valeurs représentant le fonds de roulement.

Une fois la distinction bien marquée entre le crédit commercial et le crédit commanditaire, comme nous avons essayé de l’établir dans un précédent article, tout ce que disent les deux rapports sur la bienfaisante influence de la commandite, en en faisant l’application à la société de Crédit mobilier, est vrai du crédit commanditaire en général, quels que soient ses organes. Oui, entre les entreprises dont la formation est réclamée par de grands intérêts industriels et commerciaux, et les capitalistes qui ne sont pas en état d’apprécier par eux-mêmes l’opportunité et l’utilité des placemens qu’ils recherchent, il faut qu’il y ait des intermédiaires qui procurent le placement au capital et le capital à l’industrie. Dans un pays où cette fonction ne serait point remplie, dans un pays où ce service ne serait accompli qu’imparfaitement, il faudrait assurément en favoriser et en hâter l’organisation ; mais la première observation qu’il y ait à faire à propos de la création du Crédit mobilier chez nous, c’est que la France n’en était pas là.

Le Crédit mobilier ne nous a point apporté la révélation du crédit commanditaire. Les relations du capital avec la grande industrie n’étaient pas à créer : elles avaient déjà produit la plupart des grandes entreprises qui ont dans ces dernières années imprimé à notre vie industrielle et commerciale une si puissante activité. Les maisons de banque qui servaient d’intermédiaires à ces relations n’étaient point inférieures à leur tâche ; elles n’étaient insuffisantes ni par le nombre, ni par l’influence, ni par la richesse, ni par le

  1. Le Comptoir d’escompte de Paris et les diverses formes de crédit, livraison du 1er avril.