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la révolution de février, lorsque le Comptoir d’escompte commença ses affaires. L’activité commerciale s’était arrêtée. Les transactions de vente et d’achat s’étaient resserrées dans les plus strictes limites des besoins au jour le jour. Les détenteurs de marchandises négociant manufacturiers, commerçans, avaient leurs magasins encombrés. L’écoulement des produits étant ainsi paralysé, les détenteurs de marchandises, pressés d’argent, n’avaient pas toujours, pour s’en procurer, la ressource d’effets souscrits à leur ordre, puisque de tels effets représentent des marchandises vendues. Au lieu de donner, en gage des crédits dont ils avaient besoin, des effets de commerce, expression de leurs marchandises vendues, ils ne pouvaient guère offrir que des marchandises en magasin attendant la vente. Dans cette situation, le secours de l’escompte normal leur était insuffisant puisqu’ils ne pouvaient y atteindre. Ce qu’il leur fallait, c’était de pouvoir trouver à emprunter en donnant en nantissement leurs marchandises invendues. Pour venir en aide à cette déplorable situation du commerce, le gouvernement eut recours à deux expédiens : il créa, par les décrets du 21 et 26 mars, les magasins généraux, et par un décret du 24 mars les sous-comptoirs de garantie.

Les décrets du 21 et du 26 mars ordonnèrent « la création à Paris, et dans les autres villes où le besoin s’en ferait sentir, de magasins généraux placés sous la surveillance de l’état, et où les négocians et les industriels pourraient déposer les matières premières, les marchandises et les objets fabriques dont ils seraient propriétaires. » Le même décret ajoutait que « les récépissés extraits de registres à souche, transférant la propriété des objets déposés, seraient transmissibles par voie d’endos. » Cette disposition, imitée des warrants des docks anglais, avait pour but de mobiliser la marchandise et de faciliter les prêts sur : gages. Un décret du 24 mars compléta l’institution des : magasins généraux en organisant, au moyen des sous-comptoirs de garantie, les ressources de crédit que le nantissement pouvait procurer au commerce. M. Pagnerre[1], alors directeur du Comptoir d’escompte, eut la pensée et le mérite de l’organisation des sous-comptoirs. Ces sous-comptoirs, créés d’abord au nombre de six, se partageaient les grandes branches du commerce et de l’industrie de Paris. Il y avait celui des entrepreneurs de bâtimens, celui des métaux Celui des denrées coloniales, celui de la librairie, celui des fils et tissus et celui de la mercerie. Le but de leur création était de fournir au commerce les prêts sur nantissement. Le commerçant, ayant besoin d’argent, présentait au sous-comptoir de sa spécialité un effet souscrit par lui à l’ordre de ce sous-comptoir, et, pour garantie

  1. M. Pagnerre est mort l’année dernière.