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Sir William est encore plus pénétré d’Aristote que de Platon, et c’est la meilleure préparation pour traiter la logique non-seulement avec justesse, mais même avec originalité. L’Organon est un ouvrage prodigieux qui non-seulement a créé une science tout entière, mais où tous les points auxquels cette science peut atteindre sont touchés au moins en passant, et rien en logique ne se découvrira qui n’y soit indiqué.

Mais ici nous éprouvons quelques scrupules. Sir William Hamilton dit plusieurs fois que ses articles de philosophie dans la Revue d’Édimbourg intéressaient fort peu le public anglais. À plus forte raison devons-nous craindre que nos observations ne soient insipides pour le plus grand nombre des lecteurs. Et la logique en particulier, cette science toute scolastique, comment en parler sans un pédantisme fastidieux ? Cependant notre auteur a consacré à cette science beaucoup de temps et de travail. Personne ne la sait comme lui, hors son traducteur, M. Peisse. Il croit même lui avoir fait faire un progrès en découvrant une erreur dans Aristote. Nous sommes donc tenu envers lui à dire de tout cela quelque chose. Acquittons-nous de ce devoir ; mais qu’il nous en sache gré, car il n’est pas sûr que le lecteur nous le pardonne.

Les scolastiques ont peut-être abusé de la logique ; mais, quoi qu’on en dise, ils l’ont parfaitement sue, et l’on peut trouver dans la littérature antérieure au XVIIe siècle des traités excellens qui en portent témoignage. Les Écossais en particulier ont réussi dans la logique, et il y a eu un temps où l’on tenait à honneur d’en faire venir d’Écosse des professeurs pour les universités d’Europe. Cependant cette étude a peu à peu dégénéré dans les trois royaumes, et depuis environ deux siècles on citerait difficilement dans cette matière un ouvrage en anglais d’un mérite supérieur. Il y a quelque temps, l’université d’Oxford a paru se réveiller de son sommeil, et quelques essais dus à plusieurs de ses membres ont témoigné d’une sorte de renaissance logique ; mais ces tentatives estimables ont montré en même temps combien on avait de pas à faire pour regagner le terrain perdu et pour atteindre seulement à une saine interprétation d’Aristote. Sir William Hamilton a fait une critique sévère et motivée des auteurs qui ont, il y a vingt ans, essayé de relever la logique d’un long discrédit, et parmi eux il se rencontre des noms tels que ceux de Whately et de Hampden, qui sont aujourd’hui l’honneur de l’épiscopat anglican. Nous noterons avec eux M. Cornewall Lewis, qui n’est pas autre que le chancelier actuel de l’échiquier, et nous aurions à nommer bien d’autres écrivains qui, depuis le premier article de sir William, sont venus s’ajouter à ceux qu’il a critiqués, notamment l’économiste M. Stuart Mill, si bien apprécié