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l’escompte que des effets dont l’échéance ne peut excéder trois mois.

Les opérations d’escompte des banques sont soumises à une troisième condition beaucoup plus délicate que les précédentes, car il est impossible de la ramener à une règle fixe et automatique : nous voulons parler de la proportion qu’elles doivent conserver entre la somme de leurs billets en circulation et leur réserve métallique[1]. La difficulté vient ici de la combinaison des deux fonctions très distinctes en elles-mêmes que les banques remplissent simultanément. D’un côté elles dispensent le crédit au moyen de l’escompte, de l’autre elles émettent des billets qui représentent la monnaie, et elles sont les entrepositaires les plus puissans du numéraire et des métaux précieux. Elles sont donc soumises à l’influence des circonstances qui affectent le crédit en général, et à l’influence des circonstances qui affectent les mouvemens des métaux précieux entre les nations commerçantes. Elles sont solidaires de la situation générale du crédit, puisqu’elles reçoivent autant de crédit qu’elles en donnent; elles sont solidaires des mouvemens des métaux précieux, puisque le crédit des billets qu’elles émettent repose sur la possibilité constante de la conversion de ces billets en numéraire. A leur tour, elles ont un moyen d’action identique sur le crédit et sur le mouvement des métaux précieux par le développement qu’elles donnent à leurs émissions et par le taux de l’intérêt qu’elles prélèvent sur les escomptes qui entraînent ces émissions. C’est donc par la façon dont elles gouvernent le développement de leurs escomptes et la fixation de l’intérêt qu’elles parviennent à garder entre leur réserve métallique et la circulation de leurs billets la proportion nécessaire pour que leurs billets soient toujours au pair de la monnaie. Afin d’achever la description du mécanisme des banques, qu’on nous permette d’indiquer rapidement l’usage que les banques ont à faire de ce moyen d’action, suivant la situation du crédit et les mouvemens des métaux

  1. On ne saurait considérer comme une règle justifiée par la raison ou par l’expérience l’opinion routinière qui fixe à un tiers de la somme des billets en circulation le chiffre de la réserve métallique nécessaire pour garantir la solvabilité des banques. Cette opinion, qui n’a ni valeur commerciale ni valeur scientifique, semble basée sur l’hypothèse suivante. La circulation des billets étant la contre-valeur des effets que la Banque a en portefeuille et le maximum d’échéance de ces effets étant de trois mois, on suppose qu’ils arriveront à échéance par tiers de mois en mois; la Banque dans cette hypothèse rentrerait donc chaque mois dans un tiers de la valeur représentée par la circulation de ses billets. On conclut de là apparemment qu’il lui suffit d’avoir l’avance d’un tiers en espèces métalliques destinées à faire face aux remboursemens de billets qui lui seraient demandés le premier mois, pour être en mesure d’arriver mois par mois et tiers par tiers à la réalisation des effets qui sont la contre-valeur de sa circulation. Il est inutile d’insister sur la puérilité de cette appréciation, d’ailleurs inexacte en fait, puisqu’elle ne tient compte que de la circulation et omet les autres engagemens immédiatement exigibles des banques.