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s’obstine à vouloir rester indépendante et à refuser de goûter les douceurs de l’empire haïtien. La France et l’Angleterre ont cherché à tempérer l’humeur belliqueuse de l’empereur noir ; elles n’ont réussi qu’à ajourner ses projets. Soulouque pendant ce temps organisait son armée, faisait des préparatifs formidables, et il s’est décidé enfin à aller prendre en personne le commandement de ses forces, résolu à se couvrir d’une gloire immortelle. Mais c’est ici, hélas ! que commence la tragique aventure. Par malheur pour Soulouque, les Dominicains ont un chef énergique, le général Santana, qui s’est mis en état de défense, bien qu’il dispose de peu de moyens. Voilà l’inconvénient : la République Dominicaine s’est défendue, et cette surprenante attitude a déconcerté tous les plans de conquête. C’est au mois de décembre dernier que Faustin Ier commençait sa marche guerrière. Il n’avait pas moins de trente mille hommes, des approvisionnemens assez considérables, un trésor de trois millions de dollars. Soulouque s’est avancé vers la frontière. Arrivé à un point nommé Mirabelais, il a détaché un petit corps qui devait le rejoindre à Azua, tandis qu’il suivait lui-même une autre route. Le moment de la lutte approchait. Qu’est-il arrivé ? Le petit corps détaché vers Azua a rencontré les Dominicains, et au premier choc les Haïtiens ont pris la fuite, bien qu’ils fussent à peu près vingt contre un. Un vieux général et quelques officiers s’obstinaient seuls à se faire tuer. La grande armée de Faustin n’était pas plus heureuse dans sa marche. L’empereur haïtien comptait plus de vingt mille hommes contre quatre cents Dominicains. Ici encore c’est la même péripétie : la première ligne se replie sur la seconde, qui se replie sur la troisième, et ainsi de suite, ce qui fait que l’armée de Soulouque a eu une retraite très précipitée. Canons, approvisionnemens, trésor, Faustin a tout perdu, moins les hommes, qui se sont débandés et n’ont plus reparu pour la plupart. Soulouque lui-même a complètement disparu au premier moment. Il s’était réfugié d’abord dans un petit village du nom de Bonheur, nom tout de circonstance. On n’a plus su un instant ce qu’était devenu Faustin. Il a reparu depuis pourtant, et il a fait, dit-on, fusiller quelques généraux. Recommencera-t-il sa marche guerrière ? L’expérience doit lui montrer que la fortune a ses retours, et que les ambitions de gloire ont leurs amertumes. Il a perdu une armée, il pourrait une autre fois y jouer un jeu plus dangereux pour lui.

CH. DE MAZADE.
ESSAIS ET NOTICES.

SUR LES PROGRÈS RÉCENS DE LA GALVANOPLASTIE.


De toutes les parties de la fameuse Encyclopédie française du siècle dernier, celle qui traite des arts et métiers est certainement l’une des plus importantes et des plus utiles, et c’est en même temps celle qui a eu le moins de lecteurs. Il est pourtant très curieux d’étudier les procédés par lesquels le génie de l’homme a maîtrisé la nature et a tiré tant d’avantages