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pas tous, et que plusieurs protestaient ne rien ouïr, pendant que les autres étaient charmés de cette mélodie angélique.

Sous l’influence qui les domine, certains mediums imitent avec une habileté surprenante la figure, la voix, la tournure et les gestes de personnes qu’ils n’ont jamais connues, et jouent des scènes de leur vie d’une façon telle qu’on ne peut s’empêcher de reconnaître l’individu qu’ils représentent. De la sorte il se développe en eux une aptitude singulière à la mimique, comme se développe la faculté de composer ou d’écrire. On a rencontré ailleurs des exemples d’une semblable faculté, et Joseph Acosta, qui résida longtemps au Pérou dans la seconde moitié du XVIe siècle, rapporte qu’il y existait encore à cette époque des sorciers qui savaient prendre ou du moins imiter toutes les formes qu’ils voulaient.

Les camisards, qui se voyaient entourés de merveilles, pour qui les petits enfans faisaient entendre des paroles de piété et de consolation, à qui les prophètes annonçaient l’avenir, qui entendaient des musiques célestes dans le vide de l’air, ne doutaient pas que d’aussi éclatans miracles ne touchassent les cœurs endurcis ; ils attendaient que les dragons s’éloigneraient, que le grand roi serait fléchi, et que même le pontife de Rome inclinerait devant la volonté divine sa triple couronne. Les convulsionnaires fondaient d’autres espérances, mais non pas moindres, sur les visitations dont ils étaient les objets ; ce Paris, ce lieu de tumulte, d’affaires et de licence, ce Paris, au sein duquel les œuvres surnaturelles s’accomplissaient, allait se convertir, et la cour de Rome, subissant à son tour l’action de ces manifestations irrésistibles, se réformerait. Rien de tout cela ne s’accomplit, et, quelque garanties qu’elles fussent par des miracles, les espérances étaient vaines. À la vérité, grâce à l’exaltation religieuse qui les animait, une poignée de camisards tint longtemps tête aux dragons de Louis XIV et arracha une meilleure capitulation qu’une si faible troupe ne devait l’attendre ; mais la grande persécution n’en poursuivit pas moins son cours, et le protestantisme ne fit aucun progrès. Il en fut de même du jansénisme ; lui aussi ne retira aucun profit des merveilles de Saint-Médard, et si l’ordre des jésuites fut supprimé, cette suppression est le résultat de conditions historiques qui n’ont aucun rapport avec les phénomènes du convulsionarisme. De nos jours, ceux des Américains parmi lesquels les forces mystiques ont élu domicile, qui reconnaissent qu’un pouvoir inconnu s’applique à remuer, soulever, retenir, suspendre et déranger de diverses manières la position d’un grand nombre de corps pesans, le tout en contradiction directe avec les lois reconnues de la nature ; qui voient des éclairs ou clartés de différentes formes et de