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marchandise. Le prix de revient est d’ailleurs grevé des frais de transport ou de conduite des animaux réexpédiés de Sceaux et de Poissy jusqu’à Paris, où ils auraient pu arriver directement par toutes les voies qui convergent vers la capitale. À ces frais de double transport pour une portion de la route s’ajoutent les dépenses fréquemment occasionnées par le renvoi d’un marché à l’autre. En cas de mévente, ces chances défavorables s’aggravent encore, lorsque les éleveurs, forcés de réaliser leurs fonds, revendent à des nourrisseurs établis aux environs. Ceux-ci, devant entretenir durant plusieurs jours les animaux qu’ils ont ainsi recueillis occasionnellement, ajouteront encore ces nouvelles dépenses au prix coûtant de l’animal, déjà prêt pour l’abattage ; il faudrait en outre porter en ligne de compte la moyenne des pertes qu’amènent divers accidens et les maladies durant des transports aussi compliqués. On calcule en somme une augmentation de 10 à 15 pour 100 sur le prix coûtant de la viande de boucherie pour ces diverses causes[1].

On écarterait ces embarras et on épargnerait la plus grande partie de ces frais en substituant aux marchés de Sceaux et de Poissy deux autres marchés établis près des murs d’enceinte de la capitale et le plus possible à proximité des principaux abattoirs, qui eux-mêmes sont peu distans des boulevards extérieurs. Tous les bouchers pourraient ainsi acheter directement ; il leur serait même facile de s’entendre de différens quartiers pour partager les produits du dépeçage suivant les habitudes de leur clientèle. Rien ne s’opposerait à ce que les marchés nouveaux, l’un vers la rive gauche, l’autre à portée de la rive droite, fussent permanens. Alors les examens des acheteurs, des inspecteurs ou agens de la salubrité, parfois même des grands consommateurs, seraient faciles, exciteraient une sorte d’émulation entre les fournisseurs, et concourraient à modifier heureusement la situation de cet important commerce. Il résulterait donc de ces dispositions nouvelles : économie sur le prix de revient, amélioration de la qualité, très grandes facilités commerciales, et garanties plus certaines quant à la qualité et à la salubrité des viandes de boucherie.

Ces diverses améliorations se prêteraient un mutuel secours ; elles s’allieraient parfaitement aussi avec les moyens de développer la production animale en France qu’offrent les distilleries nouvelles,

  1. D’après un recueil spécial et bien informé, voici quels seraient ces excédans de frais que l’on pourrait supprimer en plaçant ces marchés sous les murs de Paris :
    ¬¬¬
    Une journée de plus de chemin à parcourir pour 85,000 bœufs 300,000 fr.
    Renvoi de 13,000 non vendus ou vendus à perte hors des marchés. 325,000
    Excédant de frais de commission, 1 pour 100 300,000
    Frais de vente à la cheville 1,000,000
    Somme totale à épargner 1,925,000 fr.