Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 1.djvu/469

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’avoir forcé la main au Danemark et à toutes les puissances maritimes pour leur faire résoudre à son heure une difficulté que l’Europe aurait abordée à un autre moment, se montrera-t-il de bonne composition sur les arrangement qu’on prendra sans lui pour conserver quelques débris du péage du Sund, sous le nom de droits de phares et de pilotage ; mais l’affaire est très sérieuse pour le trésor danois, qui remplacera malaisément un revenu de 6 à 7 millions de francs sur un budget d’à peu près 40. Le cabinet de Copenhague a donc proposé de renoncer au péage, moyennant un rachat par voie de capitalisation du montant annuel des droits. Il a évalué le produit annuel à 2,100,000 rixdalers (5,880,000 francs), dont le pavillon des États-Unis ne supporte que 90,300, c’est-à-dire une proportion de 200 pour 100 du produit total, et il demande que la capitalisation ait lieu sur le pied de vingt-cinq années ou de 4 pour 100, ce qui donnerait une somme d’à peu près 150 millions de francs à répartir entre toutes les puissances dont le commercé maritime profiterait de la suppression du péage. Malheureusement cette combinaison soulève, en théorie comme en pratique, des objections graves et nombreuses. Nous ignorons si les gouvernemens représentés à la conférence de Copenhague sont préparés à l’accueillir favorablement, et si même, une fois la question de droit posée, ils admettront le principe du rachat ou de l’indemnité. Quant aux États-Unis, après avoir, il y a quelques années, pensé à offrir au Danemark une somme de 250,000 dollars pour se libérer du péage, ils ont résolu de décliner toute demande de cette nature, et ne se prêteront qu’à l’établissement d’un tarif de navigation pour l’entretien des fanaux et pour le pilotage. Les finances du Danemark auront donc probablement à subir une pénible épreuve ; et si l’on envisage dans son ensemble la situation de cette monarchie, le sourd mécontentement du Holstein, où depuis quelque temps les esprits sont fort agités, les tiraillemens de l’opinion dans le royaume proprement dit, toutes les difficultés enfin qui se rattachent à la question de succession au trône, on ne peut se défendre du pressentiment que l’avenir de cette partie de la famille scandinave n’est pas définitivement fixé.

Le premier mois de la session du congrès des États-Unis se sera terminé sans que l’opiniâtreté des partis à soutenir leurs candidats pour la présidence de la chambre des représentans ait cédé devant le besoin de faire les affaires du pays. Après une foule de ballottages et de tentatives de rapprochement qui n’ont servi qu’à mettre plus en relief les dissidences des trois grandes fractions de l’assemblée, le candidat des know-nothings du nord, des abolitionistes démocrates et des free-soilers, M. Banks, n’a pas encore réuni la majorité légale ; le candidat de l’administration, c’est-à-dire des démocrates, M. Richardson, qui vient après lui, n’a pas perdu de terrain ; enfin celui des know-nothings du sud et de la Pensylvanie, M. Fuller, a aussi conservé, à peu de chose près, les votes qui s’étaient dès l’abord portés sur lui. On ne prévoit pas le dénoûment de cette lutte extraordinaire, qui continue à retarder l’envoi du message, et qui ne laisse pas de mettre à une épreuve assez délicate la solidité des institutions fédérales. L’administration de M. Pierce n’a donc pas encore eu l’occasion de faire connaître avec la dangereuse solennité d’une déclaration gouvernementale ses vues et ses