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LES ROUMAINS

I.

LES TITRES DE LEUR NATIONALITÉ.


I. — une nationalité découverte — établissement des colonies.

Huit millions d’hommes frappent, en supplians, au seuil de nos sociétés occidentales. Que veulent-ils ? Ils demandent qu’on les aide à renaître ; ils revendiquent notre alliance. À peu près inconnus, égarés au bout de l’Europe, ils racontent que de longs siècles de servitude, d’oubli, de déprédations, et tout ce que des hommes sont capables de souffrir, les ont tenus ensevelis, séquestrés du reste de l’espèce humaine. Ils ont vécu, disent-ils, dans un désert, mais dans un désert où ils n’ont échappé à aucune des misères que traînent après elles l’extrême barbarie et l’extrême civilisation. Après cela, ce qu’ils craignent le plus, c’est qu’une adversité si longue, si persévérante, les ait défigurés au point que les sociétés et les peuples auxquels ils s’adressent ne les reconnaissent plus.

Chose nouvelle en effet dans notre monde moderne, ils ne réclament pas notre assistance, comme cela s’est vu toujours, au nom seul de la justice, de l’intérêt de tous, de l’humanité blessée et violée. Non ; la nouveauté et la grandeur de leur cause, c’est qu’ils se présentent comme des frères oubliés. Avec un accent qui rappelle certains grands procès plaidés par des nations entières dans Thucydide et dans Tacite, lorsque la parenté du sang était encore sacrée, ce qu’ils invoquent surtout, c’est la communauté d’origine ;