n’est que la conséquence de leur situation antérieure ; les circonstances ne font que mettre en saillie les gages de paix, les périls ou les pièges qu’ils portent en eux-mêmes. La Suisse n’a point vu cesser la lutte entre le radicalisme et les élémens conservateurs, lutte qui tend à s’apaiser, il est vrai, sur certains points, mais qui reste encore vive à Fribourg et dans le Tessin. L’Allemagne, déjà si perplexe dans le choix d’une politique extérieure, semble retombée dans la somnolence de sa vie intérieure. En Prusse seulement, la session qui vient de s’ouvrir montre l’antagonisme du parti féodal et du libéralisme modéré. La Hollande en est toujours à ses paisibles travaux, dont les discussions législatives qui se poursuivent sont la régulière expression. L’Italie ! l’Italie reste encore ce qu’elle a été depuis ses dernières commotions et même avant ces commotions, le théâtre à demi voilé d’un travail plein de mystères et d’incertitude.
Si on observe les états italiens dans leur existence individuelle, chacun a ses traits distincts et sa sphère d’action. Le Piémont marche évidemment au premier rang aujourd’hui, et il le doit surtout à l’intelligente et vigoureuse initiative qu’il a su prendre en s’alliant à l’Occident dans une question qui intéresse l’Europe entière, en montrant le drapeau italien là où n’a point paru encore le drapeau des maîtres de la Lombardie. Est-ce à dire que le Piémont n’ait pas lui-même ses difficultés et ses pièges ? Le cabinet de Turin vient de voir se dénouer à l’honneur des deux parties son récent démêlé diplomatique avec la Toscane ; mais il lui reste encore ses différends avec Rome au sujet de toutes les questions religieuses, et un esprit d’équitable conciliation vint-il enfin écarter ces différends, il lui resterait en outre des difficultés financières qui ne sont pas sans gravité. Ce qu’il y a de brillant et de généreux dans le rôle du Piémont, le voyage de Victor-Emmanuel à Paris et à Londres l’a révélé. Le roi est revenu à Turin satisfait de l’accueil qu’il a reçu, et cette situation même peut donner plus de force au gouvernement piémontais pour surmonter ses embarras intérieurs. De tous les pays de l’Italie, l’état romain est sans contredit le plus éprouvé. Ici malheureusement il est à craindre qu’il n’y ait que peu de progrès dans l’affermissement d’un pouvoir dont l’indépendance est pourtant la garantie des nations catholiques. On ne saurait se faire illusion, les années ont beau passer, l’expédition de Rome dure encore, et sa durée reste peut-être la triste, mais nécessaire condition de la sécurité temporelle du saint-siège.
À Naples, on a vu quelles complications ont été sur le point de surgir et de mettre le gouvernement des Deux-Siciles presque en lutte directe avec la France et l’Angleterre. Ces complications se sont heureusement évanouies ; une politique prévoyante semble avoir prévalu. À vrai dire, comme à tous les souverains absolus, il peut arriver souvent au roi Ferdinand II d’être servi dans son système intérieur au-delà de ce qu’il veut. Dans de tels pays, il n’y a qu’une volonté au sommet, et elle peut être éclairée ; mais il y a à tous les degrés mille petits despotismes qui, au lieu de désarmer les passions révolutionnaires, les activent et les enflamment là où la libéralité des actes serait infiniment plus efficace et bien des fois plus conforme à la pensée du souverain. Il y a dans le gouvernement napolitain des hommes faits pour comprendre et pratiquer cette dernière politique. De ce nombre est M. Lodovico Bianchini, aujourd’hui ministre de l’intérieur, et qui exerce provi-