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hygiéniques du charbon, et les fondeurs ne sont pas plus d’accord que les savans les plus illustres. Cependant les praticiens les plus habiles donnent encore la préférence au charbon.

Quoi qu’il en soit, c’est grâce aux perfectionnemens apportés maintenant dans le moulage aussi bien qu’à la division intelligente du travail substituée aux vains efforts qu’on faisait autrefois pour couler d’un seul jet, que les fondeurs sont parvenus, surtout dans ces vingt dernières années, à imprimer à leur industrie une impulsion puissante. Ils peuvent maintenant traduire en bronze avec promptitude et économie les modèles qu’on leur présente sans en altérer ni le sentiment ni la délicatesse. Une fois débarrassée des jets et des évents, chacune des parties du modèle sort du moule telle à peu près qu’elle doit demeurer définitivement : il ne reste plus qu’à les raccorder et à les souder entre elles ; le travail du ciseau est réduit à son minimum. Ce travail, ainsi restreint, exige même encore beaucoup d’habileté et d’intelligence, et si des hommes exercés à la pratique du dessin mettaient la dernière main à ces bronzes, l’exécution y gagnerait certainement beaucoup ; mais il en est rarement ainsi : ce travail est le plus souvent abandonné à des ouvriers, et si au point de vue de l’art les résultats sont peu satisfaisans, ils le sont complètement au point de vue de l’industrie et du bon marché.

Les bronzes d’art sont destinés, soit à figurer comme bronzes proprement dits, soit à être dorés. Dans le premier cas, on les met en couleur à l’aide de compositions diverses qu’on applique au pinceau sur la surface du métal préalablement chauffé. Cette couleur varie suivant le goût des époques, et le temps lui donne un caractère spécial qui relève singulièrement la beauté de l’alliage. C’est ce qu’on appelle la patine du bronze : elle devient d’autant plus belle, que l’alliage a été mieux composé. Elle est surtout admirable dans les bronzes antiques et florentins. On arrive du resté à donner directement au bronze la couleur antique au moyen de solutions diverses dans lesquelles il entre du vinaigre, du sel ammoniac, de la crème de tartre, du sel marin et du nitrate de cuivre. Il est plus difficile d’imiter la patine des bronzes florentins. Si le bronze est destiné à être doré, il faut le composer de telle sorte qu’il présente un grain assez compact pour que la quantité d’or nécessaire à le couvrir ne soit pas trop considérable. L’alliage quaternaire (cuivre, zinc, étain, plomb) est alors le meilleur.

Tels sont les procédés successifs dont a disposé l’industrie des bronzes et les conditions au milieu desquelles elle se produit de nos jours. Il devient aisé maintenant de comprendre la valeur des monumens que les différentes époques de cet art nous ont transmis.