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diverses que le problème des chemins de fer a traversées sous le gouvernement de 1830, un rôle utile dont il est juste de consacrer ici le souvenir. Trop souvent, nous le savons bien, la polémique passionnée de certaines feuilles eut pour effet de ralentir les travaux; mais ces inconvéniens s’effacent devant le service qu’a rendu la presse périodique, collectivement considérée, en revenant presque chaque jour, sous une forme ou sous une autre, à un sujet alors ignoré. C’est ainsi seulement qu’on pouvait faire pénétrer dans les cerveaux des idées sans lesquelles on n’aurait pu trouver l’accès des bourses individuelles. Contentons-nous de rappeler ici comme exemple que cette Revue a largement payé son tribut à la cause nouvelle[1].

A côté de ces efforts cherchant à populariser l’œuvre et à répandre du jour sur ses différens côtés, il se produisit des combinaisons ayant pour but d’en rendre l’accomplissement plus facile. Tantôt on voulait que sur les chemins où la circulation ne devait pas être très active, c’est-à-dire sur presque tous les chemins en dehors d’un rayon resserré autour de la capitale, on se contentât d’établir une seule voie, idée concevable alors, mais que les rapides accroissemens de la circulation auraient presque partout déjouée; tantôt on tachait d’amener l’administration des ponts et chaussées à se départir de sa rigueur en fait de pentes et de courbes, et on soutenait de longues luttes pour obtenir, sous ce double rapport, des adoucissemens qui ont seuls rendu possible, sans-aucun inconvénient, la construction de plusieurs chemins placés dans des conditions spéciales. D’autres fois on proposait de relier les voies fluviales avec les chemins de fer, non plus pour créer une concurrence, mais pour diminuer la longueur des voies ferrées. Ainsi, sur le chemin de Paris à Lyon, Chalons aurait été le point extrême, et on se serait servi de la Saône comme d’un prolongement naturel; mais ces changemens de voies eussent entraîné des retards fâcheux, retards bien longs surtout quand il aurait fallu remonter le cours des rivières. Enfin, en vue d’appeler les capitaux, on vit surgir cent combinaisons financières, parmi lesquelles l’émission de bons dits bons de chemins fer, productifs d’intérêt et placés sous la garantie du gouvernement, n’était pas le mode le moins ingénieux et le moins propre à seconder le prompt achèvement des ouvrages confiés à l’état. Appuyées souvent sur des calculs erronés, ou impliquant des conditions

  1. Nous citerons les travaux suivans : Des Chemins de fer comparés aux lignes navigables, par M. Michel Chevalier, livraisons des 15 mars et 15 avril 1838; — Du réseau des Chemins de fer tel qu’il pourrait être établi, par le même, 15 avril 1838; — Les Chemins de fer, l’État et les Compagnies, par M. V. Charlier, 1er janvier 1839; — Réseau complet des Chemins de fer pour la France, avec une carte, par MM. R. Morandière et Sagey, 1er février 1842; — Des Projets de loi sur les Chemins de fer, par M. Léon Faucher, 1er mai 1843; — Les Chemins de fer et les Canaux en France, en Angleterre et en Belgique, par M. Ch. Coquelin, 15 juillet 1845; — De la Crise des Chemins de fer, par M. A. Cochut, 1er juin et 1er août 1847; — Les Chemins de fer atmosphériques, par M. Lamé-Fleury, 1er août 1847; — Les Travaux publics en France depuis février, par M. Collignon, 1er décembre 1849.