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qui reçoit par les chylifères les sucs extraits des alimens, qui fournit à toutes les nutritions, à toutes les sécrétions, et qui, par l’intermédiaire des capillaires, est constamment divisé en deux parts : l’une artérielle, rutilante et propre à tous les usages ; l’autre veineuse, d’un rouge foncé, usée, si je puis parler ainsi, et allant chercher sa revivification dans les cellules pulmonaires. Or les humeurs, c’est le nom qui sert à désigner ces liquides, ne furent pas moins difficiles à étudier que le reste, on peut même dire qu’elles le furent davantage, car on n’est arrivé qu’après la connaissance générale des solides à la connaissance générale des humeurs. Au milieu de cette infinie variété de substances, — les unes propres à l’état de santé, les autres propres à l’état de maladie, — les unes demeurant closes dans les tissus, les autres destinées à venir au dehors, — il fallut déterminer ce qui était constituant et ce qui ne l’était pas, et de ce travail surgit la notion de quatre humeurs qui sont douées de la propriété élémentaire de toute vie, c’est-à-dire d’un mouvement double et continu de composition et de décomposition. Ces humeurs sont le sang, le chyle, la lymphe, et ce que les anatomistes nomment le blastème, c’est-à-dire un liquide apte à fournir des germinations, des productions.

La voie était ainsi largement ouverte, et on s’y précipita de tous côtés. Un instrument que la physique avait créé depuis quelque temps (remarquez que jusque-là il n’avait été que d’un très faible usage à la biologie, qui n’était pas assez avancée pour en profiter), le microscope, devint l’agent indispensable des découvertes ultérieures. Lui seul permettait de suivre la nature sur le terrain où la nouvelle position de la question avait transporté les recherches. Ce n’était pas avec l’œil simple qu’il était possible de classer les tissus et de poursuivre la dissection jusqu’aux élémens. Ces élémens furent enfin trouvés, et il fut reconnu qu’ils se réduisaient à trois : l’élément végétatif, qui compose les végétaux et une grande part du corps des animaux, et qui est doué de la propriété fondamentale de tout organisme vivant, la nutrition, c’est-à-dire un travail double et continu de composition et de décomposition ; — l’élément musculaire, qui est doué de la contractilité et qui exécute les mouvemens nécessaires, soit qu’il s’agisse de mouvoir le corps ou les membres, soit qu’il faille lancer le sang circulairement dans le système sanguin ou faire cheminer les matières alimentaires dans les conduits digestifs : — enfin l’élément nerveux, qui est doué de la sensibilité, commande aux muscles, apporte les sensations, et élabore la pensée. C’est à ces trois élémens que se réduisent toutes ces choses si complexes qui constituent l’organisme. On a ainsi sous les yeux toute la trame de la vie : l’élément cellulaire, qui est partout l’agent de la nutrition,